Les joyeuses

Michel Quint

Éditions Gallimard, Folio, 2010, 180 p., 6,90 €

LU DANS LE CADRE D’UN PARTENARIAT BLOG OF BOOK / FOLIO

4 ième de couv :

«Les enfants, le destin est une vaste plaisanterie, une histoire pleine de bruit et de fureur racontée par un idiot… Ce soir, nous avons la réponse à la vieille question, to be or not be : nous sommes, nous vivons, nom de Zeus! Nous venons de perdre Fenton, et nos commères de Windsor sont orphelines du jeune premier. En gros, je suis dans la merde pour mes représentations! Alors que notre concours du meilleur Falstaff serve au moins à désigner le successeur de Bruno au bras d’Emma! Je déclare solennellement Rico gagnant d’une nuit d’amour et désormais titulaire du rôle de Fenton! Apprends le texte dès aujourd’hui, petit et viens dans mes bras!»

Michel Quint nous invite à partager le quotidien d’une troupe de comédiens délurés. Au-delà d’un éloge du théâtre, c’est à la vie et aux plaisirs de la chair qu’il rend hommage.

CITATION :

« Longtemps les mots ont roulé au fond de moi comme des cailloux au lit d’un torrent. Ils se précipitaient dans ma gorge, débordaient sur ma langue, butaient au barrage des dents et je parvenais juste à en cracher quelques-uns qui ne voulait rien dire. Les gens les attrapaient au vol, les regardaient un instant au creux de leurs mains, navrés de ne pas les comprendre, puis les laissaient tomber dans la poussière du chemin. Les autres, qui se bousculaient encore dans ma bouche, je les ravalais et ils retournaient à mes fleuves intérieurs. » (p.11 premier paragraphe).

CHRONIQUE : 

Disons le tout de suite, c’est un roman qui me « parle », divers éléments sont entrés en résonance avec ma vie. Sans parler du premier paragraphe que j’ai adoré. Si je savais je le mémoriserais. On dit souvent que la première phrase est la plus importante, il me semble que dans ce paragraphe Michel Quint nous donne les pistes pour la suite.

Parlons du titre : « les joyeuses » : pour « Les joyeuses commères de Windsor » de Shakespeare, pour les attributs masculin, et enfin le surnom des bouteilles de vin. Théâtre, sexe, et le vin qui coule à flot… cohérent puisque nous sommes dans le thème des bacchanales tout au long.

Décidément Shakespeare est entré dans mes lectures de ses derniers temps. Je n’ai pas lu la pièce mais Michel Quint nous en donne son interprétation et donne très envie de la lire.

Michel Quint a su trouver les mots pour retranscrire la Provence du Comtat Venaissin. Lorsque je lisais les passages sur la lumière, la chaleur, la vie, j’ai retrouvé des sensations que j’ai connu car j’ai vécu dans cette région il y a quelques années.

Le passé qui refait surface, des secrets inavoués, des fausses confessions, on se demande si tout n’est pas qu’illusion ?

Des vies ont basculé en 1968, d’autres en 2008 qui vont former la boucle.

Ce roman est un conte cruel comme parfois la passion en réserve. Quand tout est dit, que la vérité est mise à nue que reste t-il?

Dans un vignoble calme une troupe de théâtre va créer un chaos, bouleverser le cours tranquille où chacun cache ses failles. On tombe dans la démesure. Va t-on retrouver la paix?

Le champs lexical de la voix et de la parole est prépondérant. Nous avons le bégaiement, la langue que le vin délit, la voix cristalline, la voix d’argent etc.

Nous avons l’écrit qui comble le manque de parole.

Le mensonge qui comble les secrets du passé. Le chagrin qui masque la souffrance de l’humiliation de l’adultère.

On a aussi l’éveil amoureux avec ses balbutiements, ses maladresses, ses cruautés…

Les enfants (Simon et Federico) qui se sont formés en réaction aux excès sexuels des parents. La libération sexuelle des uns crée un refus d’être volage de Simone et Rico. Simone ayant des doutes sur l’identité de son géniteur n’arrive pas à se construire.

Des vies ravagées par un secret, mais de la vérité certains êtres vont pouvoir s’épanouir.

Nous avons des gens ordinaires brisés par désamours et des passions.

J’ai beaucoup aimé le travail préparatif de la mise en scène de la pièce, comment petit à petit Jean-Pierre Bernier emmène les acteurs amateurs ou professionnels à se surpasser a être habités par les personnages. Le travail de création à l’état pur.

C’est un roman de la sensualité. Le corps est omniprésent jusqu’au corps manquant qui va faire sont apparition. Entrée et sortie de scènes très bien mise en scène.

Une mention spéciale à Babelio  qui m’avait proposé le même partenariat.

Article précédemment publié sur Canalblog

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