L’anguille

Valentine Goby

Éditions Thierry Magnier, 2020, 144p. , 11,50 €

Dans ma médiathèque il y a…

4e de de couv. :

Camille est née sans bras. Avant son déménagement cela ne posait de problème à personne mais dans ce nouveau collège, le regard des autres ne la quitte plus. C’est vrai qu’elle impressionne
avec sa bouche et ses pieds d’une rare dextérité. Quand ils la voient nager comme un poisson, ses camarades n’en croient pas leurs yeux. Enfin, acceptée, l’enthousiasme de Camille l’anguille va gagner Halis, cet élève que l’on chahute à cause de son poids.

Mes impressions de lecture :

Quel plaisir de retrouver la délicatesse et la bienveillance de Valentine Goby. Dans chaque roman que je lis d’elle, que ce soit en adulte ou jeunesse, elle aborde des sujets forts qui font réagir le lecteur. Des sujets qui touchent au corps, à l’intégrité et à la fragilité. Mais corps et esprit se rejoignent lorsqu’il faut se protéger.

Ce qui m’a plu dans ce roman c’est qu’elle part d’un handicap physique vers le sujet de la situation de handicap. La souffrance dû au regard et au jugement de l’autre.

On découvre une adolescente comme les autres qui doit affronter un changement de vie et de collège. J’ai beaucoup aimé comment la romancière qui est la narratrice nous montre cette gamine avec des préoccupations qu’on peut comprendre. Puis petit à petit on va découvrir que son stress à une raison supplémentaire.

Nous allons surtout suivre deux personnages l’un avec « trop » et l’autre avec quelque chose en « moins ». Dans les deux cas le regard extérieur va influencer leur façon de réagir. Le regard pour certains s’arrête à la surface des choses. Elle va changer la focale.

Camille est lumineuse et elle va voir au-delà des apparences. Elle va aider par son comportement les autres collégiens à révéler ce qu’ils ont de beau en eux. Elle est dans une démarche positive et créatrice. L’émulation du groupe va leur permette de se surpasser.

La création est aussi au cœur de cette histoire, chacun est porteur d’une œuvre en devenir. L’adolescence peut être une période de construction et de mutation, mais pas toujours.

Ce roman permet de mettre en avant la beauté de la diversité et le potentiel de chacun, grâce à l’amitié, la bienveillance et le soutien. Tout n’est pas tout rose.

J’ai aimé la façon d’avancer étape après étape. Ils vont évoluer au fur et à mesure. Bien sûr tous ne sont pas dans cette dynamique.

C’était intéressant de voir les références du milieu sportif  de Camille.

Les personnages sont touchants. On les voit de la sphère familiale à la sphère sociale où le langage, la communication verbale et visuelle jouent un grand rôle.

Des personnages auxquels les adolescents peuvent s’identifier, des situations quotidiennes des collégiens avec leurs relations de groupe.

Je vous laisse découvrir cette histoire que vous soyez adolescent ou adulte vous y trouverez des questionnements. C’est un roman qui peut être le point de départ de discussion.

Un paquebot dans les arbres

Valentine Goby

Actes Sud, Août 2016, 272 p., 19,80€

Lu dans le cadre des « Les matchs de la rentrée littéraire 2016 Priceminister-Rakuten ».

4e de couv. :

Au milieu des années 1950, Mathilde sort à peine de l’enfance quand la tuberculose envoie son père et, plus tard, sa mère au sanatorium d’Aincourt. Cafetiers de La Roche-Guyon, ils ont été le cœur battant de ce village des boucles de la Seine, à une cinquantaine de kilomètres de Paris.
Doué pour le bonheur mais totalement imprévoyant, ce couple aimant est ruiné par les soins tandis que le placement des enfants fait voler la famille en éclats, l’entraînant dans la spirale de la dépossession. En ce début des Trente Glorieuses au nom parfois trompeur, la Sécurité sociale protège presque exclusivement les salariés, et la pénicilline ne fait pas de miracle pour ceux qui par insouciance, méconnaissance ou dénuement tardent à solliciter la médecine.
À l’âge où les reflets changeants du fleuve, la conquête des bois et l’insatiable désir d’être aimée par son père auraient pu être ses seules obsessions, Mathilde lutte sans relâche pour réunir cette famille en détresse, et préserver la dignité de ses parents, retirés dans ce sanatorium – modèle architectural des années 1930 –, ce grand paquebot blanc niché au milieu des arbres.

Anecdote :

J’ai choisi ce roman dans les livres sélectionnés pour « Les matchs de la rentrée littéraire 2016 Priceminister-Rakuten ».

Il y a dans ce roman des événements qui sont entré en résonance avec ma vie comme cela arrive parfois en lisant un livre. Du coup, ma lecture a été plus longue que prévue et ma chronique aussi… Alors que c’est une histoire qui nous happe !

Ma Chronique :

Valentine Goby aime les sujets forts. Des sujets qui touchent au corps et à l’esprit. Ici le corps est en souffrance et va avoir des répercutions sur toute une famille et au-delà du cercle familial. Il y a la déchéance du corps, les non-dits autour de la maladie, les choix, envie de vivre, la mise en parenthèse de la vie…

Valentine Goby met le doigt sur un paradoxe. On sait détecter la maladie, on sait même la soigner à cette époque là, mais voilà ça coûte cher et tout le monde ne peux avoir droit aux soins et aux nouveau médicaments. On est dans la France des années 50-60. On peut s’empêcher de penser aux premiers traitements du sida , et autres maladies qui aujourd’hui encore ne sont pas éradiquées partout.

La maladie du père va se transmettre à la mère et c’est toute la famille à la mère c’est toute la famille qui va être détruite.

En parallèle de cette situation on a le personnage de Mathilde la cadette, celle du milieu, celle qui n’est ni l’a grande ni la petite. D’autant qu’elle remplace un garçon mort et qui va jouer le rôle de remplaçante allant jusqu’à façonner son corps pour être « le p’tit gars » de papa. Elle est en admiration devant son père.

A l’ainée on a attribuée le rôle de la fille parfaite qui doit faire sa vie hors du cercle, ce qu’elle fera volontiers. Quand au petit dernier on lui demande de ne pas prendre de place et de ne pas faire d’histoire.

D’autre part on a la mère qui n’a d’yeux que pour son mari et qui se décharge de son rôle de mère sur cette Mathilde.

L’histoire que nous la narratrice est celle que Mathilde lui a racontée cinquante ans après sur les ruines du sanatorium, sur les ruines de sa vie.

Il y a des passages qui prennent aux tripes, qui nous révoltent. Il y a de l’espoir de la vie au milieu de la débâcle. Car il y a la jeunesse, l’envie de vivre les bonnes rencontres.

On va sortir aussi du cercle de la maladie pour suivre l’actualité du pays qui est aussi dans une période sombre où le sang coule aussi à flot. Il n’y a pas que l »es tubards » qui se vident de leur sang. Il y a la guerre d’Algérie, les attentats, le racisme… « Et au milieu coule la seine » comme dans le poème de Guillaume Apollinaire. La Seine est très présente dans ce roman et je n’ai pu m’empêcher de me souvenir du poème « sous le pont Mirabeau » qui se termine par :

« Vienne la nuit sonne l’heure
Les jours s’en vont je demeure »

Ce roman nous parle aussi de mots de mots qui entourent la tuberculose, de la médecine, la pauvreté et la guerre. La petite Mathilde va les apprendre au fur et à mesure.

Très beau roman.

Je remercie Les matchs de la rentrée littéraire 2016 Priceminister-Rakuten et j’espère que Valentine Goby gagnera.

Article précédemment publié sur Canalblog

Qui touche à mon corps je le tue

Valentine Goby
Folio, 2010, 144 p.,

Parlons Livres 66

4ème de couv :
 « Marie G., faiseuse d’anges, dans sa cellule, condamnée à mort, l’une des dernières femmes guillotinées. 
Lucie L., femme avortée, dans l’obscurité de sa chambre.
Henri D., exécuteur des hautes œuvres, dans l’attente du jour qui se lève.
De l’aube à l’aube, trois corps en lutte pour la lumière, à la frontière de la vie et de la mort. »

Valentine Goby.

Ma Chronique

Le thème proposé en ce mois de mars 2015, n’est pas un thème inconnu pour moi. Il se trouve que depuis le début de l’année j’ai lu trois autres livres forts où l’état de femme est au centre de l’intrigue.(1)

« Qui touche à mon corps je le tue » avec un tel titre on entre déjà dans vif du sujet. Au fils des vies qui se dévoilent on va découvrir se qui se cache derrière ce titre.
La femme, son corps et son esprit, parfois on lui nie l’un ou l’autre voir les deux et plus encore.
La thématique de cette lecture commune était un titre avec un prénom ou que cela parle de la femme. J’ai choisi ce roman car c’est un livre que j’ai essayé de lire à plusieurs reprises et que j’ai du reposer car ce n’était pas le moment. Aujourd’hui, c’était le bon moment semble-t-il… ne vous y trompez pas il est assez bref, mais vous le reposerait de temps en temps car il est intense, il vous prend au ventre … Valentine nous emporte dans des émotions fortes.
Il ne s’agit pas d’un livre qui traite sur pour ou contre l’avortement, les deux positions seront présentes, Valentine Goby va au-delà de ce clivage.
On a trois personnages que rien ne laisse présager que leurs destins se croiseraient. On a Lucie L. celle qui veut avorter, Marie G. la faiseuse d’ange, et Henri D. l’exécuteur des Hautes Œuvres … et la mort qui rode dans ce Paris sous occupation Allemande.
Valentine Goby va nous raconter trois parcours différents mais où il est question de rapport à la mère et des conséquences sur leur avenir. Ils ont tous trois des failles et blessures émotionnelles et psychologiques.
Valentine Goby a choisi de montrer l’évolution et ne s’est pas contenté de dire « ils sont comme ça aujourd’hui parce qu’ils ont vécu ça durant leur enfance et jeunesse », c’est plus complexe.
Elle nous parle des meurs en France fin XIX début XX siècle. Elle nous remets dans le contexte… l’histoire se termine le 30 juillet 1943.
La notion de classe et position sociale a une grande importance. Par exemple :
La bonne à tout faire dit qu’elle est blanchisseuse.
Le bourreau crée une entreprise de cycle pour ne pas dire à son fils qu’il est exécuteur officiel.
Les thématiques touchant à la propreté et de la souillure sont omniprésentes.
Les trois personnages se voient comme des êtres transparents qui s’effacent…
La mère de Lucie L. tisse la laine.
Les parents d’Henri D. travaillent dans une usine de bonneterie, et tissage industriel.
Et Valentine Goby tisse des scènes qui racontent alternativement les souvenirs de chaque personnage.
Il est beaucoup question de couleur et de lumière dans ce roman.
L’écriture de Valentine Goby nous entraîne dans l’intimité de ses personnages qui ont plus ou moins existé dans la vraie vie.
Chacun à leur manière ont recherché que leur vrai Moi soit révélé pour se sentir exister. Valentine Goby leur donne corps, un corps, leur corps et leur âme vont rentrer en symbiose. 
(1) « La garçonnière » Hélène Gremillon (auteur de « le confident ») –  « Le gardien invisible »  Dolores Redondo – « Jeanne » Patrick Da Silva

Article précédemment publié sur le blog Parlons livres 66, mon ancien club de lecture.

L’échappée

Valentine Goby

Éditions Gallimard, 2007, 228 p.

LU DANS LE CADRE DU LDPA 4

4e de couv :

«Nous marchons, suivies par la foule, têtes rasées parmi les décombres de l’avenue Janvier, de la rue Saint-Hélier dévastée, criblée de béances et d’immeubles en ruine, pendant des semaines c’étaient des gravats enchevêtrés de poutres, de meubles brisés, chambres, cuisines, salles à manger réduites en poussière, éclats de verre, j’imagine que c’était comme ça, tout est déblayé et vide maintenant, je trébuche sur des souvenirs que je n’ai pas, les bombardements ont eu lieu sans moi, j’étais terrée dans un couvent mais je sais tout, ils m’ont fait ce que la guerre leur a fait.»

Ma chronique :

Depuis le temps qu’on me disait de lire un roman de Valentine Goby ! Merci à Delcyfaro d’avoir fait sortir se roman de ma Pal comme un lapin du chapeau du magicien. J’ai découvert une écriture, un style particulier. Valentine Goby écrit de courtes phrases suivies de phrases plus longues qui forment comme un collier de perles. Elle utilise souvent les énumérations, tel une accumulation de mots, un inventaire, une énumération qui donne un certain poids à ce qui est dit.

Ce roman est un roman de femme, et je ne parle pas de l’auteure, ce sont des histoires de femmes. L’histoire commence en 1941, la vie n’était facile pour personne, mais encore moins pour une jeune fille de la campagne.

Madeleine a 16 ans, elle travaille dans un hôtel de Rennes où vivent les allemands, et elle rentre tous les week-ends dans son village. Chez elle, on masque sa féminité alors qu’en ville elle va rencontrer quelqu’un qui va lui révéler cette part d’elle. De là suivront les moments de bonheurs les plus intenses et les malheurs les plus grands. Parce que c’était lui, parce que c’était elle, un pianiste allemand et une soubrette française vont aller au-delà des apparences, derrière l’ennemi il y avait un homme a qui ont a pas laissé le choix. Il est l’occupant, elle n’aurait pas dû rêver.

Nous avons des secrets de famille et des non-dits qui vont être exposés au grand jour qui vont bouleverser la vie de Madeleine.

J’ai beaucoup apprécié la thématique de la lumière et de la mer (l’eau). Cette enfant de la campagne rêve de voir la mer, Joseph lui permettra de réaliser ce souhait.

« Miserere » est un chapitre très dur.

Le chapitre « l’entre-deux-terres » : J’ai moins aimé cette partie là, même si certains sujets étaient intéressants.

Cette période d’errance et de vie fille-mère / mère-fille m’a laissé une impression de décousu, c’était peut-être l’effet recherché.

Le chapitre « trois rêves avant Kleinstadt » m’a un peu dérouté et la fin et surprenante.

Finalement je garde un sentiment mitigé, comme si petit à petit j’avais décroché.

Mais, j’espère lire d’autres romans de cette auteure pour voir si ce qui m’a plu dans l’écriture est sa marque de fabrique.

LDPA4

Merci Galleane!

A bientôt pour une autre découverte !

challe100

13/100

Article précédemment publié sur Canalblog