Vent blanc, cavalier noir

Luke Rhinehart

Trad. Francis Guèvremont

Éditions Aux Forges de Vulcain, 3 sept 2021, 272 p., 20 €

4e de couv. :

« Je ne suis pas morte », dit-elle avec une voix douce et émerveillée.

Matari, qui s’était enfoncée dans la nuit neigeuse dans l’espoir d’y mourir, est sauvée et recueillie par Oboko, un poète et moine bouddhiste. Nous sommes au Japon, au début du dix-huitième siècle. Oboko et son ami Izzi, un poète de cour, aussi extraverti qu’Oboko est secret, s’éprennent, l’un comme l’autre, de la jeune femme, qui leur apprend que, bientôt, ils seront tous les trois rejoints, et sans doute massacrés, par le Seigneur Arishi, auquel Matari était promise, et qu’elle a fui.

Mes impressions de lecture :

J’ai découvert cet auteur il y a relativement peu de temps et je vais de surprise en surprise à chaque roman. Je ne m’attendais pas au contenu de ce roman. J’avais aimé le côté irrévérencieux, cynique, sarcastique  de ce qu’il dénonçait dans les autres romans que j’ai lu. Mais ici, dès les premières pages je me suis rendu compte que je devais tout oublier de Luke Rhinehart.

« Vent blanc, cavalier noir » est mon coup de cœur de la rentrée.

Les questionnements d’Oboko sur sa recherche du détachement qu’impose le zen, ainsi que ses difficultés à trouver la concentration nécessaires. Son deuil et l’écho de ce passé récent. Tout cela nous le rend plus humain que ce personnage d’ascète que certains voient.

La rencontre avec le deuxième acteur de ce drame est cocasse car c’est un peu comme son double inversé. Leur vision de la vie est opposée ou complémentaire selon comment on se positionne.

J’ai adoré leurs conversations. Un préambule à ce qui va se jouer ensuite.

Nous avons ensuite le décor du premier acte. Un temple désolée, délabré et abandonné où nos deux héros sont bloqués par la neige. On se dit qu’on va avoir des discussions philosophiques et poétiques pendant un laps de temps, peut-être jusqu’à mourir de faim ainsi  coupé du monde dans provisions. On sent presque que c’est ce qu’ils recherchent. L’un a mal au cœur (physique) et l’autre au cœur (émotion).

Mais voilà qu’apparait le personnage féminin et d’entrée Izzi  sait qu’Oboko a ramené le début de la fin. Une bombe a retardement. Cette apparition presque surréaliste donne une dimension supplémentaire à cette histoire.

Et effectivement dans le deuxième acte et les suivants on va se rendre compte que ce roman est la chronique d’une mort  annoncée…

Les personnages qui vont venir s’insérer dans ce drame jouent chacun un rôle  comme au théâtre.

Le drame va se déployer comme un éventail, les brins s’ouvrent et petit à petit l’image complète va nous dévoiler la fin du drame.

Nous allons suivre les différentes étapes de cette tragédie avec une fin inexorable.

Je ne vais pas vous les dévoiler mais chaque acte est soit symbolique soit inéluctable à chacun d’y voir ce qu’il ressent. C’est difficile de ne pas commenter ces scènes…. Mais chut, je me tais !

J’avais imaginé une autre fin mais elle n’avait pas le même impact, j’y avais projeté mes idées et non celles liées au zen. Je parle de Zen mais je ne connais pas vraiment.

Je ne vous ai pas parlé d’un des multiples sujets de ce roman celui de la poésie, nos deux personnages du départ son deux poètes avec des approches bien différentes. Puis la plume va être confrontée au sabre et à l’arc.

Luke Rhinehart a su me faire oublier le présent le temps de cette lecture. J’étais avec les personnages, tantôt l’un, tantôt l’autre. J’ai retrouvé la « tragédie » de la littérature japonaise qui joue avec les codes sociaux avec les personnages qui ne peuvent sortir du rôle qui leur est assigné.

Je ne peux finir dans parler de la couverture qui est juste magnifique. Bon d’accord mon avatar est une kokeshi mais cette « geisha » de dos et le choix des couleurs qui donne le ton.

On a envie de terminer ce roman pour en finir avec ce supplice de savoir comment cela va se terminer et puis après on ressent un vide, c’est déjà fini ? Les personnages sont parfois agaçants (on a envie parfois de leur donner des gifles) mais  on s’y attache.

Je remercie les Éditions Aux Forges de Vulcain de leur confiance.

Voir aussi :

L’homme-dé

Invasion

La muse ténébreuse de Charles Baudelaire

Raphaël Confiant

Éditions Mercure de France, 2 sept 2021, 266 p.

Mes lectures Mercure de France

4e de couv. :

Pour la postérité, le nom de Jeanne Duval reste lié à celui de Charles Baudelaire. Apprentie comédienne ou fille de joie, muse ou diablesse, qui était vraiment celle qui traversa la brève existence du poète, enchanta sa plume et le plongea dans les tourments de l’amour et de la passion ? Qui était Jeanne Duval, venue des îles d’Amérique ou de l’océan Indien, ou peut-être du pays des Maures, et qui fit découvrir à Baudelaire un monde insoupçonné de sensualité et d’exotisme ? Un monde encore plus singulier que celui offert par le chanvre indien et l’opium dont l’auteur des Fleurs du mal faisait une consommation déraisonnable…

Mes impressions de lecture :

Raphaël confiant est un auteur que je suis plus ou moins depuis longtemps. On ne sait jamais ce qu’il va nous faire découvrir. Il joue avec les registres de langue et les genres littéraires cependant une chose est sûre il sait raconter et accrocher son lecteur.

Lorsque j’ai vu que ce roman sortait à la rentrée j’ai eu envie de le lire pour plusieurs la première parce que j’aime ce qu’écrit Confiant, la seconde parce que je ne connaissais rien de Jeanne Duval. Je n’ai aucun souvenirs d’avoir appris cela lors que j’ai passé mon bac au siècle dernier (j’ai eu Baudelaire « petits poèmes en prose : Le joujou du pauvre » à l’oral et ça je m’en souviens !). Et pourtant, il semble qu’elle ai inspiré bien des artistes. Et elle ne passait pas inaperçu, car elle n’était pas très discrète, elle était très grande et métis, elle avait la langue bien pendue et ne s’en laissait pas compter.

Jeanne Duval est en couverture photographiée par Nadar en 1858, et il se  dégage de ce regard quelque chose d’étrange. Elle est là sans être là.

Raphaël Confiant a su transcrire dans ce roman la vie chaotique de Jeanne Duval, Charles Baudelaire et l’entourage artistique.

La temporalité est assez destructurée tantôt on a des souvenirs racontés, tantôt le passé et le présent qui semblent s’entremêler. Le livre est divisé en 5 cercles et cette idée de boucle on la ressent aussi dans la façon de raconter les choses.

Il donne la parle à Jeanne et à Charles. Ils semblent réinventer leur passé, leur vie. On dirait qu’à force de se raconter ils finissent par y croire eux-mêmes à leur version de leurs vies. C’est parfois déroutant à lire.

Il est beaucoup question d’identité, elle change plusieurs fois de nom au cours de sa vie mais c’est aussi sur « qui elle est » que l’accent est mis jusqu’à la fin.

Ce roman nous replonge dans la deuxième moitié du XIXe siècle avec toute l’effervescence qui régnait à Paris.

Raphaël Confiant donne la parole à Jeanne et Charles et ces voix différentes donnent des images différentes.

Je ne connaissais pas l’importance de Nadar dans la vie de Jeanne et Charles et leur petit groupe très bohème. On se rend compte de la grande variété d’artistes qui se côtoyaient peintres, poètes, écrivains et photographes… le théâtre et la musique aussi jouent un rôle dans cette mouvance.

Raphaël Confiant montre aussi le côté sombre de cette époque entre les conséquences de l’esclavage, la prostitution, l’état sanitaire, la politique et le fossé entre le Paris Haussmannien et le Paris des faubourgs.

Un texte très intéressant pour toutes ces facettes et bien d’autres que je vous laisse découvrir.

Je remercie les Éditions Mercure de France de leur confiance.

Sable Bleu

Yves Grevet

Éditions Syros, Hors collection, 26 août 2021, 331 p., 16,95 €

Chronique jeunesse du mercredi

Rentrée littéraire 2021

4e de couv. :

Tess ose à peine y croire : le monde va mieux. La Terre respire depuis qu’une étrange bactérie a contaminé les gisements de pétrole. Et puis il y a ces médicaments, ces aliments nocifs qui disparaissent inexplicablement des magasins. Des hackers de génie à tendance écolo seraient-ils à l’origine de ces phénomènes ? À plusieurs reprises, Tess sent des présences autour d’elle, des frôlements, et se demande si la réponse n’est pas à chercher ailleurs. Alors que la police s’intéresse à son cas, des jeunes gens se mettent à disparaître eux aussi.

Mes impressions de lecture :

Yves Grevet nous présente à nouveau un personnage fort qui n’hésite pas à affronter les épreuves de la vie malgré son jeune âge (16 ans).

Je ne voudrais pas dévoiler l’intrigue mais on peut dire que Tess est le pivot de cette histoire. Il y a plusieurs trames et à chaque fois elle fait la jonction. D’ailleurs, elle se fait tout de suite repérer que ce soit au niveau politique, amoureux ou mystère.

On la découvre dans le cercle familial,  le cercle amical, le cercle intime, le cercle activiste et le cercle mystère. A chaque fois elle doit accepter sa différence et se dépasser et la revendiquer.

A chaque cercle un secret, un mystère… des non dits.

Tout s’enchaîne en fonction de ce qu’elle est, de qui elle est, que ce soit les choix de ses activités et de ses convictions… et on aura la solution qu’à la fin même si on en devine les grandes lignes avant.

Tess n’a pas choisi la voie la plus facile pour avancer dans la vie et devenir adulte. Mais a-t-elle vraiment choisi  ou est-ce que c’est son destin ?

J’ai associé le titre (exotique et intriguant) avec le personnage et je me suis demandé si Tess n’était pas le petit grain de sable qui allait tout en rayer.

Yves Grevet a su jouer avec les variations d’intensités dans une vaste palette d’émotions qui fait vibrer le lecteur.

Il est très difficile pour moi de parler de ce roman qu’on dévore, car je suis allée de surprise en surprises et je voudrai que vous aussi vous puissiez expérimenter cette sensation avec ce page turner qui enchaine les rebondissements.

Ce roman aborde de nombreux sujets très actuels avec des sujets qui n’auraient pas été abordé aussi clairement il y a une dizaine d’années en littérature jeunesse.

Il est beaucoup d’identité dans tous les sens du terme. Yves Grevet en explore plusieurs facettes de ce questionnement important à l’adolescence.

La partie « fantastique » ou futuriste explore plusieurs possibilités.

Je remercie les Éditions Syros de leur confiance

Qui en parle ?

Jangelis ?

NB :

un roman en appelle d’autres, j’ai pensé à plusieurs histoires, en voici quelques exemples

« TerreS » Carina Rozenfeld

« La fille du Futur » Nathalie Stragier

« La fille des manifs » isabelle Collombat