Mississipi solo

Eddy L. Harris

Trad. : Pascale-Marie Deschamps

Éditions Liana Levi, coll. Piccolo, mai 2022, 12 €

Souvenir d’une rencontre à la Comédie du Livre de Montpellier mai 2022

4e de couv. :

Le Mississippi. Un fleuve mythique qui descend du lac Itasca dans le Minnesota jusqu’au golfe du Mexique, en passant par Saint-Louis et La Nouvelle-Orléans. Impétueux et dangereux, il charrie des poissons argentés, des branches d’arbre arrachées, des tonnes de boue, mais aussi l’histoire du pays et les rêves d’aventure de ses habitants. À l’âge de trente ans, Eddy décide de répondre à l’appel de l’Old Man River, de suivre en canoë son parcours fascinant pour sonder le cœur de l’Amérique et le sien, tout en prenant la mesure du racisme, lui qui ne s’est jamais vraiment vécu comme Noir. Au passage, il expérimentera la puissance des éléments, la camaraderie des bateliers, l’admiration des curieux ou l’animosité de chasseurs éméchés. Mais aussi la peur et le bonheur d’être seul. Il en sortira riche d’une force nouvelle et d’un livre fondateur.

Mes impressions de lecture :

J’ai assisté à une présentation de la maison d’édition par Liana Levi et l’éditrice a beaucoup parlé du travail de Eddy L. Harris. C’était la sortie en poche de ce roman et la suite de l’aventure était parue quelques mois au paravent « le Mississipi dans la peau ».

C’est un roman tiré d’une expérience très personnelle. Cette aventure l’a tellement marquée que plusieurs années après il récidivé. Maintenant que j’ai lu « Mississipi solo » je suis très curieuse de voir ce qui a changé dans cette partie de l’Amérique et comment il a abordé ce nouveau voyage, mais ceci est une autre lecture (à venir).

Dans «  Mississipi solo » à plusieurs reprises il se demande ce que les gens garderont de son bref  passage dans leur vie. Il fait référence entre autre au fait qu’il soit noir. Eh bien moi je ma brève rencontre au salon du livre de Montpellier c’est un homme grand qui dédicaçait debout et qui avait une jolie voix. Je n’avais encore rien lu de lui donc je n’avais pas grand-chose à dire.

J’ai choisi ce roman pour découvrir l’auteur à cause de les thématiques… l’eau, le fleuve, le voyage, la nature.

C’est un roman avec des chapitres courts qui mettent en avant un aspect du voyage. On a le pourquoi, le comment et avec qui… En fin de volume on a aussi une carte de l’itinéraire.

On pourrait croire avant de le lire que ça serait répétitif mais pas du tout. Chaque jour est une étape différente que ce soit au niveau de ce qu’il ressent, ce qu’il vit ou ce qu’il voit. Ce n’est pas non plus une accumulation de rencontres et d’anecdotes, il y a toute une réflexion sur la vie et sur son pays.

Il sait faire ressentir au lecteur les épreuves qu’il va vivre. Il n’est pas vraiment préparé pour ce périple, il a un côté naïf qui permet au lecteur de mieux s’identifier. On est loin du récit d’un sportif de haut niveau entrainé qui a l’habitude des voyages extrêmes. Il n’est pas dans la performance. Il est touchant et fait parfois sourire.

J’ai beaucoup aimé suivre ses aventures et ses rencontres. Comment en toute simplicité il nous raconte son parcours chaotique sur ce fleuve qui traverse plusieurs états d’Amérique. Il nous raconte une autre Amérique. Celle de gens pas sophistiqués et très attachés à leurs terres. On est loin du rêve américain et de la course à la réussite.

On va ressentir ses états d’âmes et ceux des gens qu’il a croisé.  Va-t-il réussir ? Dans quel état va –t-il terminer cette aventure.

C’est un cheminement personnel où les souvenirs se mêlent aux évènements présents et aux pensées de l’auteur.

C’est le style de livre où on a envie de souligner des phrases…

Je remercie Liana Lévi d’avoir su titiller ma curiosité. Ils sont terribles ces éditeurs passionnés !

Pour la petite anecdote je parlais avec une copine au téléphone et elle me dit je viens de lire un roman génial « Mississipi… » et moi de terminer « solo »… j’étais en train de le lire… j’adore ce genre de coïncidences.

Je vous laisse découvrir à votre façon ce roman.

Challenge VLEEL « un auteur que j’adorerais voir en VLEEL »

«Challenge 15 K #18.Tom Sawyer : « un livre qui se passe en Amérique »

Sorrowland

Rivers Solomon

Trad. Francis de Guévremont

Éditions Aux Forges de Vulcain, 2022, 510 p., 20 €

Mes Lectures aux Forges de Vulcain

4e de cou. :
Vern est enceinte de sept mois et décide de s’échapper de la secte où elle a été élevée. Cachée dans une forêt, elle donne naissance à des jumeaux, et prévoit de les élever loin de l’influence du monde extérieur. Mais, même dans la forêt, Vern reste une proie. Forcée de se battre contre la communauté qui refuse son départ, elle montre une brutalité terrifiante, résultat de changements inexplicables et étranges que son corps traverse. Pour comprendre sa métamorphose et protéger sa petite famille, Vern doit affronter le passé…

Mes impressions de lecture :

J’ai découvert l’écriture de Rivers Solomon avec « Les Abysses » qui m’avait emporté dans son univers aquatique. Lorsque j’ai lu la quatrième de couverture de ce roman je me suis dit qu’après l’élément aquatique nous allions plonger dans la terre. Terre nourricière ou sépulcrale ? Mais rien n’est aussi simple, il y a tant de possibles.

On va suivre les différentes étapes de ce parcours de vie bien singulier. On la voit combattre ses vieux démons. Comment vivre librement lorsqu’on vous a été programmé physiquement et mentalement ?

Quel est ce lieu appelé le Domaine béni pays Caïn ? Au début on voit se dessiner un univers  autour du révérend Sherman où vivent des afro-américains loin du monde corrompu des blancs. On imagine bien le concept à l’américaine, avec toutes sortes d’idées pour maintenir sa communauté sous sa coupe. Cependant, plus on avance, plus Vern soulève des voiles. Plus elle s’enfonce dans la forêt et la terre plus elle se « purifie » plus on découvre la corruption et la maltraitance.

Dans un premier temps on a l’impression qu’elle retourne à la vie primitive, dans le rôle de la mère et ses enfants, où son instinct lui dictera la voie à suivre et plus on découvre des facettes très étranges. Au fur et à mesure que le temps, elle va faire des rencontres qui vont lui permettre de révéler sa véritable nature et les autres façons de voir le monde.

Le roman devient de plus en plus complexe au fur et à mesure que Rivers Solomon développe certaines idées en fonction du rôle de ses personnages. Amitié, amour et soif de liberté, sortir du moule dans lequel la société essai façonner les êtres humains.

Les univers de Rivers Solomons sont vastes et très riches. Bien que très différents pourtant retrouvé des points communs entre « Abysses » et « Sorrowland » comme deux facettes d’un diptyque. Je n’en dis pas plus pour ne pas vous influencer car c’est peut-être moi qui tisse des liens invisibles.

Roman très intéressant qui fait écho à l’actualité tout en jouant avec l’imaginaire et la fiction. J’ai hâte de découvrir son prochain roman pour voir vers quels confins de l’âme humaine Rivers Solomon va nous emmener.

Je vous invite à vous aventurer dans une autre Amérique que celle que l’on nous sert habituellement.

« Sorrowland » est un roman qui demande aux lecteurs de se poser les bonnes questions sur la société que l’on souhaite avoir.

NB : j’ai adoré en particulier les références à Ursula K. Le Guin.

Je remercie les Éditions Aux Forges de Vulcain de leur confiance.

Challenge 15 K #22.Deux papas

#paye ton slip

Challenge VLEEL

Daddy

Emma Cline

Trad. Jean Esch

Éditions de la Table Ronde, sept 2021, 266 p., 22 €

Mes Lecture de la Table Ronde

Rentrée littéraire 2021

4e de couv. :

Une jeune fille devient la cible de la presse à scandale après avoir été la nounou du fils d’une célébrité. Une adolescente séjourne chez son amie, dans le ranch d’une communauté hippie, et découvre la perversité des premiers jeux sexuels. Un rédacteur en chef lâché par tout son réseau de relations et par sa fiancée tente de devenir le prête-plume d’un self-made-man. Une trentenaire se fait passer pour une ado sur des sites de rencontre. Un père se demande quelle image ont aujourd’hui de lui ses enfants, venus fêter Noël en famille. Un autre, alerté d’un incident dans l’école de son fils, a rendez-vous avec le directeur de l’établissement. Un scénariste divorcé retrouve chez elle sa petite amie dont les addictions cachent un profond mal-être. Un jeune homme qui vit et travaille dans la ferme de son beau-frère se demande quel futur les attend ici, lui, sa femme et leur enfant à naître.
Autant de nouvelles que de décors balayés du regard incisif d’Emma Cline, qui éclaire au passage, d’un rai de lumière implacable, la perversité larvée en chacun de ses personnages, en même temps que leur immense vulnérabilité.

Mes impressions de lecture :

La rentrée littéraire ce ne sont pas que des roman , il y a aussi des nouvelles.

Je vous ai déjà parlé de cette écrivaine et son roman «  Harvey » dans lequel on se retrouve dans la peau d’un producteur de cinéma accusé de « harcèlement sexuel ».

Ne vous laissez pas attendrir par la couleur « rose  » de la couverture. Cet intérieur de voiture n’inspire pas la douceur…

« Daddy » est un recueil de dix nouvelles avec des points communs. Je vous ai déjà parlé de l’une d’elle « Los Angeles » qui  m’a marqué et que j’ai relu en connaissant la fin ce qui n’a pas empêché que j’ai eu une réaction semblable.

Je ne vais pas détailler chaque nouvelle mais vous parler de ce qui ressort de ma lecture. Au bout de trois nouvelles j’ai pensé « il y a quelque chose de pourri dans ce royaume ». Ce recueil a des fils rouges qui créent l’univers littéraire de Emma Cline.

Emma Cline nous parle de l’Amérique d’aujourd’hui, du côté de la côte Ouest et du mirage autour de Hollywood. Des gens riches (ou qui l’on été) et dépravés. Tout semble corrompu dans les relations entre les gens. L’alcool, la drogue et le sexe… Elle joue avec des variantes. Quand je dis qu’elle parle du présent c’est parce qu’elle met en avant les réseaux traditionnel et les réseaux internet. Cela touche le monde du travail scénaristes etc… mais elle n’est pas tendre avec la famille et pointe le doigts sur des relations dysfonctionnelles.

Souvent à la fin des nouvelles d’Emma Cline le personnage principal semble avoir raté le coche. Il y a un aspect désenchanté. La morale n’est pas vraiment sauve à la fin elle ne fait pas dans le happy end. Les pires salauds sont traités comme des perdants et des moins que rien. Il y a des femmes qui ne valent guère mieux, on n’est pas dans le manichéisme homme mauvais et femme victime.

Elle a un langage soutenu mais en même temps elle est direct dans ce qu’elle décrit avec parfois des ellipses.

Chaque nouvelle est très visuelle.

Je remercie les éditions de la Table Ronde de leur confiance.

Je vous souhaite une bonne lecture.

Harvey

Emma Cline

Trad. Jean Esch

Éditions de la Table Ronde, Quai Voltaire, 6 mai 2021, 106 p., 14 €

Mes lectures de la Table Ronde

4e de couv. :

Harvey a mal partout. Le bracelet électronique n’arrange rien, il a les chevilles fragiles et craint de chuter dans l’escalier tapissé de la villa qu’on lui a prêtée. Demain c’en sera fini, il sera disculpé de tout ce qu’on lui a mis sur le dos dans le seul but de lui nuire. Dès demain il pourra se lancer dans de nouveaux projets. Entre deux coups de fil à ses avocats, avec lesquels il s’efforce d’être patient, il aperçoit Don DeLillo dans le jardin voisin. Adapter son chef-d’œuvre, Bruit de fond, au cinéma. Voilà. C’est LE moment de faire ce film, braille-t-il au téléphone en attendant l’arrivée d’un médecin qui lui fera une perfusion, une nouvelle thérapie, à la pointe. Devant le miroir, Harvey songe qu’il doit se faire blanchir les dents. Il demandera à son assistante de lui prendre rendez-vous, et de lui trouver un restau où emmener DeLillo. Ah, et sa fille Kristin vient dîner ce soir avec Ruby, sa petite-fille. Tout le monde semble penser qu’il joue sa vie, demain. Il ne voit pourtant pas de raison de s’inquiéter, surtout quand il lit les commentaires de soutien sur internet – il y en a –, surtout après la perfusion qui le fait dériver dans l’espace.
Il a tout le temps devant lui.

Mes impressions de lecture :

Ce roman court est aussi percutant que la nouvelle d’ Emma Cline « Los Angeles » que j’ai lue il y a quelques mois.

Elle traite un sujet dérangeant en ce mettant du côté du « méchant ». De plus il est le reflet d’une réalité actuelle. Le fait que cela touche les femmes a peut-être aussi contribué à me mettre mal à l’aise. Ce qui en soit n’est pas un négatif puisqu’elle cela signifie que le lecteur est au plus près de ce qui est raconté.

On découvre Harvey, ce producteur de cinéma accusé d’abus de pouvoir sur des femmes. Emma Cline est assez vague sur les charges exactes retenues contre lui, puisqu’on est  auprès d’un homme en phase de dénie qui a le sentiment qu’on veut lui faire porter le chapeau. Au début on ne sait pas trop quoi en penser a-t-il raison ? Il est même optimiste que l’issue du procès. Le lecteur bien sûr fait le lien avec des affaires tristement célèbres autour du #meetoo.

Au fur et à mesure que dans son dénie il se raconte on se fait sa propre opinion. Nous avons donc l’homme avec son corps souffrant d’une part, sa colonne vertébrale qui est abîmée, symboliquement très fort. Il nous donne l’image d’un homme à terre que l’on piétine. C’est comme si on tirait sur une ambulance. 

Le personnage n’est pas sympathique, on le découvre calculateur. Il sait qu’il doit jouer un rôle pour donner une image positive de lui, mais le naturel revient vite au galop. Le pouvoir et les drogues créent chez lui  une vision de son « génie » qui fausse la réalité dans son esprit. Il va jusqu’à faire des projets professionnels, il est vraiment dans sa bulle.

On a à côté de ce corps et de cet esprit dérangé tout l’aspect logistique. On a des détails sur cette maison qu’on lui a prêté, le confort, la sécurité, l’intimité préservée. Tout n’est que luxe dans les moindres détails, ce qui ne contribue pas à le rendre plus humain et aimable.

Le rapport à sa famille est aussi perverti que les autres relations. L’utilisation de certains mots donne bien l’image d’une créature visqueuse et répugnante.

Emma Cline est lucide, elle n’est pas dans le jugement mais laisse bien en évidence tous les éléments qui vont conduire le lecteur  et son protagoniste vers une seule conclusion. Tout à coup il réalise ce qu’il va lui arriver.

Tout au long le lecteur se demande : Aura-t-il des remords ? Fera t-il son mea Culpa ? Y aura-t-il une certaine rédemption possible ?

Une nouvelle fois cette histoire d’Emma Cline est comme un coup de poing qui laisse le lecteur sans souffle.

Je remercie les Éditions de la Table Ronde de leur confiance.

Qui en parle ?

Pamolico

Maeve

A malin malin et demi

Richard Russo, Trad Jean Esch
Éditions de la Table Ronde, 2017, 613 p, 24 €

Mes lectures de la Table Ronde

malin malin et demi

4e de couv. :

Quand Douglas Raymer était collégien, son professeur d’anglais écrivait en marge de ses rédactions : «Qui es-tu, Douglas?» Trente ans plus tard, Raymer n’a pas bougé de North Bath, et ne sait toujours pas répondre à la question. Dégarni, enclin à l’embonpoint, il est veuf d’une femme qui s’apprêtait à le quitter. Pour qui? Voilà une autre question qui torture ce policier à l’uniforme mal taillé. De l’autre côté de la ville, Sully, vieux loup de mer septuagénaire, passe sa retraite sur un tabouret de bar, à boire, fumer et tenter d’encaisser le diagnostic des cardiologues : «Deux années, grand maximum.» Raymer et Sully sont les deux piliers branlants d’une ville bâtie de travers. Quand un mur de l’usine s’écroule, tous ses habitants – du fossoyeur bègue au promoteur immobilier véreux, en passant par la femme du maire et sa case en moins – sont pris dans la tempête. De courses-poursuites en confessions, de bagarres en révélations, Raymer, Sully et les autres vont apprendre à affronter les grandes misères de leurs petites existences.

Mes impressions de lecture :

Je vous ai parlé de ce roman à plusieurs reprises, en vous le conseillant, en vous en disant tout le bien que j’en passais mais sans arriver à écrire une chronique. Cela m’arrive parfois. Le fait d’avoir entre temps lu des nouvelles et un autre roman m’a permis d’enfin passer le pas. J’ai donc relu ce roman avec un peu plus de maturité.

Quand je lis un écrit de Richard Russo j’ai l’impression de rentrer dans une bulle. Il décrit une communauté de gens avec leurs spécificités et leurs singularités. On est dans ce microcosme qu’il nous retrace.  Il déroule le fil d’une existence à travers certains dialogues intérieurs des personnages. C’est comme une histoire, un contre point, dans l’histoire principale. Il accroche le lecteur, du moins ceux que ces digressions ne dérangent pas, ce qui est mon cas.

Nous avons des personnages, beaucoup d’hommes, qu’on va découvrir dans leurs failles les plus intimes. Il écrit en faisant des digressions psychologiques, on les suit dans leurs pensées, leur passifs et leurs ressentis. Et c’est ce qui fait le charme des écris de Richard Russo on voit le personnage de l’extérieur par exemple souriant  et semblant écouter un interlocuteur, et en même temps on est dans sa tête à découvrir ce qui lui traverse l’esprit à ce moment là.

Ces hommes sont loin d’être parfaits et irréprochables mais ils ne le cachant pas. En fait ils ne peuvent pas dissimuler grand choses puisqu’ils vivent dans une petite communauté. Ici North Bath qui elle aussi a un lourd passif et beaucoup de failles et faiblesses.

La décrépitude des humains et des lieux semblent vivre deux vies parallèles jusqu’au jour où…

Le vieillissement est semble t-il un sujet qui préoccupe l’auteur et donc ces personnages. L’un découvre un problème au cœur, l’autre a dû se faire opérer de la prostate etc… La libido et la sexualité aussi sont des sujets de réflexions. Comme dans la vraie vie.

Le couple, la famille, les amis, le travail et la politique, alcool, le sexe, la violence et les petites lâchetés ordinaires, j’ai failli oublier la religion, tout le monde en prend pour son grade. Pour tous ces thèmes il explore le positif mais aussi le négatif, le dysfonctionnel. Cela provoque chez le lecteur des réactions en fonction de ce qu’il ressent.

Ce que j’aime chez Richard Russo c’est qu’il parle de sujets que tout le monde peut comprendre et vivre quelque soit le pays. On est en Amérique mais pas celle des paillettes et du glamour du cinéma. Il explore les zones grises de la vie des gens ordinaires.

Il y a dans sa façon de raconter les choses un côté sarcastique, caustique mais aussi espiègle comme ces enfants qui vous lance une petite pique l’air de rien. En même temps on sent parfois une certaine tendresse pour certaines faiblesses comme s’il les connaissait bien !

C’est un roman qui exige un peu de temps pour les lecteurs lents comme moi, lorsqu’on le pose il vous en reste des scènes marquantes et des réflexions sur la vie et la mort, sur l’amitié et l’amour, sur le temps qui passe…

Je vais sans doute explorer des romans plus anciens… Je crois que j’ai « le déclin de l’empire Whithing » dans ma bibliothèque.

Et vous lequel avez vous déjà lu ou avez vous envie de lire ? Les livres de Richard Russo

Je remercie les Éditions de la Table Ronde de leur confiance.

Repost depuis mon premier blog : L’atelier de Ramettes

Retour à Martha’s Vineyard

Richard Russo

Trad. Jean Esch
Editions de la Table Ronde, 27 août 2020, 378 p., 24 €

Mes lectures de La Table Ronde
Rentrée Littéraire 2020

martha

4e de couv. :

Le 1er décembre 1969, Teddy, Lincoln et Mickey, étudiants boursiers dans une fac huppée de la côte Est, voient leur destin se jouer en direct à la télévision alors qu’ils assistent, comme des millions d’Américains, au tirage au sort qui déterminera l’ordre d’appel au service militaire de la guerre du Vietnam. Un an et demi plus tard, diplôme en poche, ils passent un dernier week-end ensemble à Martha’s Vineyard, dans la maison de vacances de Lincoln, en compagnie de Jacy, le quatrième mousquetaire, l’amie dont ils sont tous les trois fous amoureux.
Septembre 2015. Lincoln s’apprête à vendre la maison, et les trois amis se retrouvent à nouveau sur l’île. À bord du ferry déjà, les souvenirs affluent dans la mémoire de Lincoln, le «beau gosse» devenu agent immobilier et père de famille, dans celle de Teddy, éditeur universitaire toujours en proie à ses crises d’angoisse, et dans celle de Mickey, la forte tête, rockeur invétéré qui débarque sur sa Harley. Parmi ces souvenirs, celui de Jacy, mystérieusement disparue après leur week-end de 1971. Qu’est-il advenu d’elle? Qui était-elle réellement? Lequel d’entre eux avait sa préférence? Les trois sexagénaires, sirotant des bloody-mary sur la terrasse où, à l’époque, ils buvaient de la bière en écoutant Creedence, rouvrent l’enquête qui n’avait pas abouti alors, faute d’éléments. Et ne peuvent s’empêcher de se demander si tout n’était pas joué d’avance.

Ma chronique :

Quel plaisir de retrouver l’écriture de Richard Russo. C’est étrange comme on a l’impression de retrouver une certaine ambiance très caractéristique et pourtant à chaque roman est différent. Un rythme pausé malgré quelques débordements émotionnels. Mais l’Amérique est comme un personnage, on a droit aux décisions politiques et économiques. On voit se dessiner une certaine Amérique à travers l’Histoire et les petites histoires.

Richard Russo va faire parler trois personnages à la troisième personne. Chaque chapitre identifie le personnage dont on va suivre les actes et les pensées.

Ils avaient la vingtaine en 1971 aujourd’hui ils sont à l’âge du bilan et de l’introspection. Chacun a tracé sa vie en intégrant un événement fondateur pour leur vie d’adulte. La disparition de leur comparse Jacy, une fille fantastique.

Chaque personnage a son passif, ses failles et ses traumatismes. Mickey est resté l’éternel rockeur amoureux transit de Jacy, il semble avoir arrêté sa vie après sa disparition et le Vietnam. Teddy c’est un peu le mystique ça vie aussi semble été une parenthèse, universitaire bloqué dans une vie rangée aux prises avec des crises d’angoisse. Quand à Lincoln il a sa femme qui lui permit de trouver un semblant d’équilibre.

Chaque personnage est analysé, on a de véritables biographies intimes. Richard Russo soulève des voiles pour mettre en lumière ce qui était dans l’ombre. La thématique de la famille est omniprésente. Richard Russo s’attaque aux couples  mais aussi aux relations parents/enfants. Des non-dits et des fausses apparences sont comme des écrans de fumée qui leurrent leur entourage.

Le passé n’est pas derrière eux, il les accompagne. Il ne demande qu’à refaire surface. Qui dit passé dit mémoire et les souvenirs resurgissent ou sont convoqués.

Il est question de choix à l’époque et aujourd’hui (2015). Ainsi que d’amitié… Richard Russo se plait à tisser des liens qui forment des vies. Tout est lié, tout s’entrecroise…

Lincoln réuni une nouvelle fois ces deux amis sur l’île où tout à basculé. Le projet de vente de la maison familiale est un prétexte. Il invoque ses propres fantômes comme sa mère décédée de qui il tient cette propriété. Une façon de lui dire adieu et de régler des contentieux familiaux. Et cette mystérieuse disparition qui a gangréné leur tranquillité…

Sortiront-ils indemnes de ce séjour ? Sortiront-ils grandis après avoir déterré le passé ?

A vous de le découvrir !

Je remercie les Editions de la Table Ronde de leur confiance.

table ronde

La neuvième heure

Alice McDermott

Trad. Cécile Arnaud

Éditions de la Table Ronde, 23 août 2018, 283 p., 22,50 €

Mes lectures de La Table Ronde

neuvième heure

4e de couv. :

Jim agite doucement la main en refermant la porte derrière sa femme Annie qu’il a envoyée faire des courses. Il enroule alors soigneusement son pardessus dans le sens de la longueur et le pose au pied de cette même porte. À son retour, c’est un miracle si Annie ne fait pas sauter la maison entière en craquant une allumette dans l’appartement rempli de gaz.
Les chevilles enflées après une journée à faire l’aumône, sœur Saint-Sauveur prend la relève des pompiers auprès de la jeune femme enceinte et des voisins sinistrés de ce petit immeuble de Brooklyn…

Mon Billet :

Mes copines du club de lecture m’incitent depuis longtemps à lire les romans d’Alice McDermott, alors je n’ai pas hésité une seconde lorsqu’on m’a proposé de lire ce roman pour la rentrée. Quel beau moment de lecture.

Je ne sais pas pourquoi, j’ai cru qu’il s’agissait d’un recueil de nouvelles. Lorsque j’ai terminé ce que je croyais être la première nouvelle je suis restée « scotchée ». Il y avait un événement, un instant T et une chute. Bien sûr je restais aussi avec que c’est-il passé après… et c’est là que j’ai compris qu’il s’agissait d’un roman, donc je me suis crée une belle surprise !

Les chapitres portent un titre et forment pour la plupart une partie de l’histoire complète. J’ai beaucoup aimé le rythme et la narration. On fini chaque chapitre avec et maintenant que va-t-il arriver ?

Le chapitre un est le moment fondateur de là vont découler les événements qui en sont les conséquences.  On va découvrir  les vies dans certaines maisons,  les vies dans le couvent, et par extension la vie dans ce quartier.

On va suivre d’une part la vie d’Annie qui va se retrouver liée à celle des « petites sœurs soignantes des pauvres », qui elle-même sont liée à la vie de Brooklyn. Ces trois fils vont se tisser et donner une image d’ensemble de ce début de XXe siècle.

J’ai beaucoup aimé le narrateur qu’ Alice McDermott a choisi pour nous raconter ces vies. Par moment cela donne un point de vue très décalé mais je n’en dis pas plus pour que vous découvriez cette petite originalité.

Pour ceux qui auraient peur des « bondieuseries » il n’y en a pas tant que cela. Bien sûr les « petites sœurs » étant un élément primordial on a une certaine morale chrétienne et catholique qui est là. Mais elles vivent dans le siècle, elles côtoient des plus démunis, elles font office des premiers services sociaux. On est au début du XX siècle les femmes sont dans des situations assez difficiles. C’est d’ailleurs un des sujets les plus développés. Avec d’une part la vie de celles qui choisissent le mariage et celles qui choisissent la vie religieuse.

Il y a dans ce roman des parallèles qui se font. Un exemple : un personnage féminin va faire un voyage en train qui sera formateur, un véritable chemin initiatique qui décidera de son avenir. Dans un autre chapitre on va découvrir un autre voyage vécu par un jeune homme, il n’aura pas la même portée et pour lui il y aura un « renforcement » dans sa position de fils de famille. Ces deux aventures sont très significatives des différences d’éducation.

La famille est un sujet aussi très important car c’est elle qui détermine l’avenir. Il faut se détacher du  poids du passé pour avancer dans la vie. On va découvrir les effets des non-dits..

Il y a beaucoup de rebondissements qui jouent sur différents types d’émotions des larmes au rire, de la résignation à la révolte… Ce n’est pas un roman triste même si la mort et la souffrance sont le quotidien des ces personnages. Il y a les rires et l’envie de vivre qui prennent le dessus.

Je ne voudrais pas trop en dire pour vous laisser découvrir ce passé qu’on voudrait révolu et qui par certains côtés existe encore.  Je n’ai pu m’empêcher de penser à un autre roman de la rentrée « Monsieur Viannet » de Véronique Le Goaziou, un autre pays, une autre époque et encore la misère…

Je remercie les Éditions de La Table Ronde pour leur confiance.

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Article précédemment publié sur Canalblog

Des nouvelles du monde

Paulette Jiles

Trad.  Jean Esch

Éditions de la Table Ronde, coll. Quai Voltaire, mai 2018, 230 p., 21 €

Mes lectures  de La Table Ronde

4e de couv. :

Hiver 1870, le capitaine Jefferson Kyle Kidd parcourt le nord du Texas et lit à voix haute des articles de journaux devant un public avide des nouvelles du monde : les Irlandais migrent à New York ; une ligne de chemin de fer traverse désormais le Nebraska ; le Popocatepetl, près de Mexico, est entré en éruption. Un soir, après une de ses lectures à Wichita Falls, on propose au Capitaine de ramener dans sa famille, près de San Antonio, la jeune Johanna Leonberger. Quatre ans plus tôt, la fillette a assisté au massacre de ses parents et de sa sœur par les Kiowas qui l’ont épargnée, elle, et élevée comme une des leurs. Le vieil homme, veuf, qui vivait jadis de son métier d’imprimeur, profite de sa liberté pour sillonner les routes, mais l’argent se fait rare. Il accepte cette mission, en échange d’une pièce d’or, sachant qu’il devra se méfier des voleurs, des Comanches et des Kiowas autant que de l’armée fédérale. Sachant aussi qu’il devra apprivoiser cette enfant devenue sauvage qui guette la première occasion de s’échapper. Pourtant, au fil des kilomètres, ces deux survivants solitaires tisseront un lien qui fera leur force.
Dans ce splendide roman aux allures de western, Paulette Jiles aborde avec pudeur des sujets aussi universels que les origines, le devoir, l’honneur et la confiance.

Mon billet :

Lorsqu’on j’ai vu ce livre dans le catalogue j’ai tout de suite été attirée. Est-ce le titre ? Le sujet ? Le synopsis ? Je ne sais pas… ma curiosité naturelle ne s’est pas trompée et dès les premières phrases j’ai été emportée par  ce récit.

Tout d’abord, il y a les lieux avec une carte en début de volume qui nous montre le tracé de la route que doit parcourir le Capitaine Kidd, en ancrant l’histoire dans ce décor existant cela donne un côté vécu. Lorsqu’on pense aux westerns ce n’est pas à cette partie du Texas que je pense.

Ensuite, vient la partie historique. On nous retrace les grandes lignes qui expliquent le contexte politique au moment du voyage. La vie du Capitaine est mêlée à la grande Histoire de ce XIXe siècle. On est en 1870 dans le Texas, les progrès technologiques et le pétrole se situent sur une autre partie du territoire.

La notion de temps a une grande importance, on a la montre à gousset qui est comme un leitmotiv. Il y a les lunes, les longues journées de marche, les nuits écourtées… l’âge des personnages qui revient souvent dans les conversations ou les pensées.

Venons-en aux deux personnages principaux. Un couple improbable. Le vieil homme et la jeune captive libérée. Le vieil homme au bout du chemin et la gamine à la croisée des chemins. Ils n’ont tous deux pas connu un destin facile.

Le capitaine a failli perdre la vie à de nombreuses occasions puisqu’il a connu trois guerres, il a exercé différents métiers. Au moment des faits il exerce un métier qui le conduit d’une ville à l’autre où il effectué des lectures publiques. Au cours du récit on découvre que c’est beaucoup plus complexe qu’on ne le croit. Quels journaux lires ? Ce n’est pas anodin, ni sans risque comme on pourra s’en rendre compte à plusieurs reprises. Les nouvelles ne sont pas toujours de première fraicheur. Le Capitaine choisi de préférence celles qui font rêver, celles qui font voyager, certaines sont drôles d’autres dramatiques. Il y a aussi les annonces légales comme l’usage des armes, la place du Texas dans l’union etc… Il faut éviter les sources de conflits. Il commence toujours part des commentaires sur l’état des routes qu’il a parcouru les jours précédents car il n’y pas de ligne de télégraphe dans cette partie. On découvre aussi que cette activité ne fonctionne pas partout. Il y a des contrées où l’accès direct aux journaux ne nécessite pas ce type de lecteur. Il y aussi la question de la langue. Tout le monde ne parle pas anglais, il y a des communautés hispaniques ou allemandes. C’est aussi très intéressant de connaître les lieux où se déroulent les lectures car cela donne des indications sur les lieux.

En ce qui concerne les langues, sont un sujet récurrent tout au long de ce récit de voyage ou l’oralité et l’écrit sont complémentaires.

Johanna quant à elle est u ne gamine qui a vu ses parents mourir devant elle, elle a été captive des indiens Kiowa qui sont devenu sa famille, elle n’a plus de souvenirs de sa famille allemande. Elle a dix ans et vit sa séparation d’avec les indiens comme un kidnapping alors qu’elle a été troquée. Il y a comme une inversion de point de vue. Johanna est pleine de ressource et intelligente.

J’ai adoré lire comment ils vont mutuellement s’apprivoiser et créer des liens forts. J’ai senti la tristesse m’envahir au fur et à mesure qu’arrivait le terme du voyage. Le capitaine aussi, la gamine n’avait pas de notion de distance.

Ce récit de voyage est palpitant car on ne sait jamais de quoi sera fait le lendemain, ni ce qu’ils vont vivre comme péripéties sur la route. Les rivières en cru modifié la donne, la nature est dangereuse et les routes ne le sont pas moins avec tous les bandits, mercenaires, renégats et les indiens.

J’ai remarqué qu’il y avait beaucoup d’indications sur la flore, ce qui sert à se repérer, mais peu de références à la faune.

Il y aussi toute la thématique sur « sauvage » « civilisé », et ce n’est pas toujours ce qu’on pourrait croire. Le Capitaine Kidd n’est pas dupe à 72 ans il en a vu des monstruosités.

C’est un voyage plein de rebondissements, où l’on découvre des lieux, des modes de vie, des gens. Il y a des moments  palpitants qui tiennent en haleine le lecteur et d’autres qui laissent un répit aux personnages et au lecteur.

J’ai beaucoup aimé la fin car elle ne laisse pas le lecteur sur le bord de la route.

Je remercie les Éditions de la Table Ronde pour leur confiance.

 Qui en parle ?

L’atelier de  litote

Article précédemment publié sur Canalblog

Nos âmes la nuit

Kent Haruf

Trad. Anouk  Neuhoff

Éditions Robert Laffont, 2016, 168 p., 18 €

coll. Pavillon poche, 2018,  192 p., 8 €

Cercles de lectures

Dans ma médiathèque il y a…

4e de couv. :

Dans la petite ville de Holt, Colorado, Addie, une septuagénaire veuve depuis des décennies, fait une étrange proposition à son voisin, Louis, également veuf : voudrait-il bien passer de temps à autre la nuit avec elle, simplement pour parler, se tenir compagnie ? La solitude est parfois si dure… Bravant les commérages, Louis se rend donc régulièrement chez Addie. Ainsi commence une très belle histoire d’amour, lente et paisible, faite de confidences chuchotées dans la nuit, de mots de réconfort et d’encouragement. Une nouvelle vie apaisée, toute teintée du bonheur de vieillir à deux.
Hymne à la tendresse et à la liberté parcouru d’un grand vent d’humour, Nos âmes la nuit est l’œuvre qui a fait connaître Kent Haruf au grand public, quelques mois après sa mort.

Auteur et œuvres traduites :

Kent Haruf : Ecrivain américain,  1943-2014

Le Chant des plaines

Colorado blues

Les Gens de Holt County

Nos âmes la nuit

Ma chronique :

J’ai découvert ce roman grâce à des libraires enthousiastes. C’était à la rentrée littéraire 2016. J’avais gardé dans un coin de ma tête  ce titre. Je ne connaissais pas cet auteur américain décédé en 2014. Il aura fallu attendre qu’une copine m’en reparle pour son adaptation au cinéma (2017) et le passage dans Netflix pour qu’enfin je le lise. Les acteurs qui jouent les rôles principaux Robert Redford et Jane Fonda, c’est tout dire !

C’est un roman tendre et dur à la fois. Dès qu’on le commence on n’a qu’une hâte c’est de savoir ce qui va arriver à ces deux personnages très attachants.

Depuis quelques temps, il est souvent question de deuxième chance, de vivre pour soi etc. C’est aussi un des propos de ce livre. On peut peut-être s’affranchir du regard de l’autre, du qu’en dira t-on,  mais que faire du  chantage affectif de nos proches ? Peut-on couper tous les liens avec sa famille quand on un être innocent est en souffrance ?

CE roman assez bref traite de ce sujet et bien d’autres. Tout part de l’idée d’une veuve de 70 ans qui demande à son voisin lui-même veuf de conjuguer leur solitude pour retrouver un peu de tendresse et de compagnie surtout la nuit.

Ce qui commence presque comme une boutade va donner une belle histoire. Ensemble ils vont dépasser le qu’en dira t on et les rumeurs. On est dans les années 2000, on se dit que les mœurs ont évoluées, mais en fin de compte pas tant que cela.

Contrairement à ce qu’on  pourrait croire les réticences face à cette aventure ne viennent pas des personnes âgées bien au contraire cela émane des adultes « dans la force de l’âge ». Ils sont plus critiques et rétrograde.

On va découvrir petit à petit qui ils sont puisqu’ils se racontent l’un l’autre. Ils étaient voisins sans plus. Le passé s’invite parfois pour leur jouer des tours et ternis ces moments de bonheur inespéré. Doit-on payer toute sa vie des choix passés ?

Pendant un temps ils vont même reformer une petite famille et transmettre de l’amour et des connaissances. Mais le bonheur semble leur échapper, il aura été de courte durée. Un triste sire vient faire payer l’addition d’un passé mal vécu. Il a une arme pour se venger. Les gens malheureux ne supportent  pas le bonheur des autres.

Lorsqu’on ferme le livre, on espère qu’ils vivront assez longtemps pour que le bonheur mis entre parenthèse puisse s’épanouir.

Ce roman nous fait découvrir quelques facettes de la vie dans le Colorado. Les personnages découvrent qu’ils ont en eux beaucoup de trésors à partager. Il suffit de provoquer les choses ou de les saisir lorsqu’elles se présentent.

En tout cas en tant que lectrice cela ne laisse pas indifférent.

Faut-il être égoïste pour être heureux ? En tour cas je dis qu’il faut être égoïste pour faire du mal aux gens…

La vie est si courte pourquoi l’être humain a t il besoin de détruire les moments de bonheur simple.

 Bonne lecture et à bientôt !

Article précédemment publié sur canalblog

Un pied au Paradis

Ron Rash

Trad. Isabelle Reinharez

Éditions du Masque, 2002, 262 p., 19 €

Existe en poche

Lu dans le cadre du Cercle littéraire de la médiathèque

4e de couv.

Oconee, comté rural des Appalaches du Sud, début des années 1950. Une ancienne terre cherokee, en passe d’être à jamais enlevée à ses habitants : la compagnie d’électricité Carolina Power rachète peu à peu tous les terrains de la vallée afin de construire une retenue d’eau, immense lac qui va recouvrir fermes et champs. Holland Winchester est mort, sa mère en est sûre, qui ne l’a pas vu revenir à midi, mais a entendu le coup de feu chez le voisin. Ce drame de la jalousie et de la vengeance, noir et intense, prend la forme d’un récit à cinq voix : le shérif Alexander, le voisin, sa femme, leur fils et l’adjoint.

Mon avis :

J’ai connu ce roman par des libraires passionnés et des lectrices averties comme Maeve.

Dans un premier temps j’ai été surprise par le début de l’histoire, ensuite j’ai pris goût à l’écriture.

Nous sommes en 1952 à la frontière entre a Caroline du Nord et du Sud, une zone assez perdue. Il y a un contraste entre ses grandes étendues et ce monde replié sur sa communauté et son lopin de terre.

Ce roman est fait de terre et d’eau.

La terre est omniprésente sur une grande partie du roman. Une terre qui se dessèche qui perd sa fertilité. Les plantes meurent, les enfants meurent, les ventres de certaines femmes restent désespérément vides, les couples se délitent.

Les hommes ont les stigmates de la seconde guerre mondiale, de la guerre de Corée ou de la polio (pour celui qui n’a pas pu s’engager). Entre les traumatismes, paralysie, tous semblent bloqués dans cette poussière.

Dans un premier temps l’eau brille par son absence, mais elle n’est pas loin on sent l’orage qui va éclater, et en arrière plan on a le projet de construction du barrage de Caroline Power. Après le désastre de la sécheresse, c’est l(inondation par l’homme qui est annoncé  et aura lieu 18 ans après).

On sent qu’une tragédie s’annonce, elle arrive avec une femme qui tombe enceinte. Ce désir d’enfant, avec toute la pression familiale et sociale va provoquer le destin funeste.

C’et un roman en 5 parties de longueur inégale avec un narrateur différent. La première partie pourrait être une nouvelle  à elle seule, un mini polar. On suit les investigations du shérif, avec tous ses questionnements personnels. Il n’a pas encore la trentaine qu’il fait déjà un bilan de sa vie.. Il s’interroge sur le devenir de sa région. On pourrait s’arrêter là. Ce que je ne vous conseille pas. Car le roman va prendre un autre tournant avec l’apparition des autres narrateurs qui eux sont directement impliqués par le drame.  On va découvrir avec la voix due « la femme » et « du mari » (c’est ainsi que son annoncées les parties, les tenants et les aboutissants de cette histoire. Plus que deux facettes d’une même histoire c’est d’autres pans de l’histoire qui nous sont dévoilés. La quatrième et cinquième parties se déroulent dix-huit après. Un autre drame se joue conséquence du premier. Ce qui n’avait pas été achevé va l’être.

La conclusion (dernier chapitre) est donnée à un personnage secondaire qui lui viendra clore une partie de l’histoire qui était en arrière plan.

Ce que j’ai aimé c’est l’ambiance de ces êtres vieux à 20 ans coincés dans leur terre, dans leur histoire familiale. Cette Amérique terrienne faite de sacrifice, de  souffrance et de lutte.

Il y a de nombreuses références bibliques. Je ne sais pas si c’est dû à la communauté huguenote qui est venu s’installer en territoire indien au XVI e siècle.

Notamment :

C’est à la sueur de ton visage que tu mangeras du pain, jusqu’à ce que tu retournes dans la terre, d’où tu as été pris; car tu es poussière, et tu retourneras dans la poussière. (Genèse 3:19).  

On a la présence des serpents avec ce danger mortel qui n’est pas sans rappeler le péché originel et la tentation. On a l’aspect désertique lié au serpent. On a le barbelé qui se retrouve comme la couronne d’épine du christ. Il y a la blessure au cœur qui saigne et l’idée de crucifixion. On a  l’image du fils prodigue.

Après l’aridité presque désertique, on a le déluge qui vient purifier en détruisant la vallée. Il y a aussi l’idée de rédemption.

Plusieurs de ceux qui dorment dans la poussière de la terre se réveilleront, les uns pour la vie éternelle, et les autres pour l’opprobre, pour la honte éternelle. (Daniel 12:2)

Car Toute chair est comme l’herbe, Et toute sa gloire comme la fleur de l’herbe. L’herbe sèche, et la fleur tombe; mais la parole du Seigneur demeure éternellement. (1 Pierre 1:24)… la fleur s’appelle l’aconee bells , elle fait partie de la légende de ce lieu, découverte par un français, elle a disparu pendant 50 ans on l’a recherchée.

On a aussi l’ambivalence entre le feu (femmes de l’envers et commerce avec le diable) et la purification par le feu.

  • Les citations bibliques ne sont pas dans le roman mais elles illustrent ce sentiment qui ressort de ce roman. C’est mon interprétation…

La sorcellerie et autre diableries sont aussi présentes. Les protagonistes vont se raccrocher aux signes et superstitions.

Je ne sais pas si on met « un pied au paradis » j’y est vu l’enfer sur terre…

Je conseille ce livre à ceux qui aime les territoires où l’homme et la terre son intimement liés. Les amateurs de tragédies humaines.

Je pense lire d’autres romans de cet écrivain.

oconee bell

Article précédemment publié sur Canalblog