Nous n’allons pas nous réveiller

Heine Bakkeid

Trad. Céline Romand-Monnier

Éditions des Arènes, 2022, 512 p., 23 €

Masse Critique Babelio / Les Arènes

4 e de couv. :

Ce roman noir nous plonge avec l’ex-flic Thorkild Aske dans une affaire de meurtre et un passé familial troublé.
L’ex-flic Thorkild Aske est de retour à Stavanger, sur le droit chemin de la réinsertion professionnelle. Sa consommation de médicaments est sous contrôle, un brillant avenir de fabricant de chandelles se profile à l’horizon. Mais c’est sans compter cette urgence qui l’envoie en Islande avec sa sœur Liz. Après vingt-cinq ans, il revoit son père, Úlfur, un vétéran de la lutte environnementale, qui vient d’être écroué pour meurtre. Dans des paysages arides plongés dans la grisaille, la visite familiale ne tarde pas à prendre un tour mouvementé…

Mes impressions de lecture :

Le hasard de mes lectures à fait que j’ai lu en parallèle deux romans parlant d’un fils qui va aider son père accusé d’un crime. Mais traitez de manière bien différente.

Je n’ai pas souvenir d’avoir déjà lu un roman publié par cette maison d’édition, la qualité du livre autant par le texte qu’en tant qu’objet sont de belles découvertes.

C’est la première enquête de Thorkild que je lis mais j’ai bien envie de découvrir les précédentes grâce aux éléments que l’auteur a disséminés dans l’histoire.

Ce roman nous plonge dans l’Islande d’aujourd’hui et d’hier. Tout tourne autour de la cause menée par Úlfur contre la destruction du milieu naturel du pays. On va suivre Thorkild aujourd’hui qui en venant dire au revoir à son père mourant va se retrouver au cœur d’une série de morts et de disparitions. Très vite il réalise que l’origine du mal vient peut-être d’un événement qui a eu lieu en 1982. Nous allons voir remonter ses souvenirs d’enfance et il va poser inlassablement des questions sur ce qui c’était passé lors de cette marche.

Nous allons aussi suivre en italique le tueur, mais faudra attendre la fin pour comprendre de qui il s’agit et ses motivations.

L’auteur va bien différencier l’écriture entre ses trois temps/espaces. Cela donne des rythmes bien différents.

En grande partie il est questions d’écologie et de l’environnement, qui je pense doit s’inspirer de la réalité au vue de ce qu’on voit par ailleurs.

On a tout un aspect sur la manipulation, l’emprise et l’ascendant de certains. On a le cercle familial et le cercle social. Comment résister quand il s’agit de votre père ?

On va découvrir comment un ego trop grand peut détruire son entourage. L’épouse à perdu la tête, la fille est victime de violences conjugales et le fils est un mort en sursis… mais Le père, sorte de gourou, tout ce qu’il voit c’est l’Islande détruite par les constructions et les hommes.

J’ai beaucoup aimé les personnages de Thorkild et Liz, le frère et la sœur ont des parcours différents mais des êtres en souffrance. S’ils sont séparés ils sont dans l’autodestruction et quand ils sont ensemble l’un protège l’autre. Ils sont très attachants.

C’était très intéressant l’idée de « personne n’est innocent » qu’on retrouve tout au long de l’histoire. C’est aussi une manière que prendre le pouvoir sur les autres.

Il est beaucoup question de suicide, de mort… Personne n’en ressortira indemne. on a plusieurs effets miroirs le père et le fils, ou le père et le pays par exemple. Úlfur va en jouer.

Il y a beaucoup de personnages forts avec plusieurs facettes, on se pose souvent la question a qui faire confiance. Thorkild lui ne compte sur personne à part peut-être sur sa sœur ainée. Il a aussi l’art de faire « avouer » les gens avec sa ténacité, il revient sans cesse sur ce qui le préoccupe. Il est beaucoup question de mémoire.

L’enquête en elle même va devenir de plus en plus complexe au fur et à mesure qu’on découvre certains éléments.

Heine Bakkeid a su montrer les différentes facettes de ce pays, avec Hommes attachés à leur terre tout en y étant enchaîné. Il y a des sujets qu’on connait peu comme les relations entre les pays, certains personnages sont allés en Norvège pour recommencer une nouvelle vie sans pour autant arrivé à tourner la page. Les couleurs influencent aussi le regard. Il est question de regard tourné vers l’extérieur mais aussi vers le passé.

Je remercie Babelio et les Éditions Les Arènes de leur confiance.

La cité des jarres

Arnaldur Indridason

Trad. Eric Boury

Points, 2006, 408 p., 7,70€

4e de couv. :

Un nouveau cadavre est retrouvé à Reyk-javik. L’inspecteur Erlendur est de mauvaise humeur : encore un de ces meurtres typiquement islandais, un «truc bête et méchant» qui fait perdre son temps à la police… Des photos pornographiques retrouvées chez la victime révèlent une affaire vieille de quarante ans. Et le conduisent tout droit à la «cité des Jarres»…

Mes impressions de lecture :

J’ai découvert cet auteur il y a une douzaine d’année avec « L’homme du lac », j’avais aimé cette ambiance où le passé a une grande importance. J’ai lu plusieurs romans de la série des Erlandur mais je ne les ai pas tous chroniqué, puisque je n’ai retrouvé qu’un article. Dans ma pal il y a de nombreux titres en attente.

J’ai gagné  il y a quelques années un volume avec trois histoires… dont « La cité des jarres » qui est en fait la troisième enquête publiée. merci à cette blogueuse.

Dans cette histoire le fil conducteur est la femme et l’enfantement. Nous allons retrouver des personnages qui vont avoir des grossesses non désirées pour différentes raisons. Ce roman qui date de 2000 (en VO) traite déjà d’un sujet qui est d’actualité « le consentement », ce n’est pas d’aujourd’hui que certains hommes remettent en question le comportement déplacé masculin.

L’histoire débute en 2001 mais va nous faire faire des incursions dans les années 60.

Ce que j’aime dans ces séries ce sont les interférences entre la vie personnelle de l’enquêteur et sa vie professionnelle. Il a des relations très conflictuelles avec sa fille.

Il néglige sa santé et on sent poindre des problèmes futurs.

Vous savez, si vous me suivez, que j’aime la thématique de l’eau. Je m’attendais à trouver ici celle classique liée à une île et j’ai la surprise de découvrir cette du marécage asséché.

Je vous laisse découvrir ce qu’est la cité de jarre et le rôle qu’elle va jouer.

Il ne me reste plus qu’à lire les autres titres en attente.

Je n’ai pas encore tenté les autres séries.

Et vous appréciez-vous ces romans ?

Qui en parle ?

Cryssilda de « Voyager et lire »

Ör

Audur Ava  Ólafsdóttir

Editions Zulma, oct 2017, 239 p., 19€

Cercle de lecture médiathèque

Dans ma médiathèque il y a…

4e de couv. :

Se décrivant lui-même comme un « homme de quarante-neuf ans, divorcé, hétérosexuel, sans envergure, qui n’a pas tenu dans ses bras de corps féminin nu – en tout cas pas délibérément – depuis huit ans et cinq mois », Jónas Ebeneser n’a qu’une passion : restaurer, retaper, réparer. Mais le bricoleur est en crise et la crise est profonde. Et guère de réconfort à attendre des trois Guðrún de sa vie – son ex-femme, sa fille, spécialiste de l’écosystème des océans, un joli accident de jeunesse, et sa propre mère, ancienne prof de maths à l’esprit égaré, collectionneuse des données chiffrées de toutes les guerres du monde… Doit-il se faire tatouer une aile de rapace sur la poitrine ou carrément emprunter le fusil de chasse de son voisin pour en finir à la date de son choix ? Autant se mettre en route pour un voyage sans retour à destination d’un pays abîmé par la guerre, avec sa caisse à outils pour tout bagage et sa perceuse en bandoulière.
Ör est le roman poétique et profond, drôle, délicat, d’un homme qui s’en va, en quête de réparation.

Ma chronique :

C’est le deuxième roman d’Audur Ava Ólafsdóttir que je lis. J’espère un jour combler mes lacunes.

« Rosa Candida » m’a beaucoup marqué et je pense que « Ör » est dans la même veine. Nous retrouvons un homme en proie aux doutes et de faiblesse qui à besoin de s’éloigner de sa vie.

Ce roman aborde plusieurs sujets dont les mathématiques, la littérature, la philosophie, et de cultures bien différentes.

C’est un narrateur à la première personne qui nous raconte les événements. On n’aura donc que la vision de Jonas sauf dans les dialogues.

C’est un roman sur la perte.

Gundrún n°1, sa mère est bloquée dans une boucle temporelle (elle oublie au fur et à mesure ce qu’elle fait et dit). Il perd le rôle de fils.

Gundrún n°2, sa femme a divorcé. Il perd son rôle d’époux.

Gundrún n°3, sa fille, il apprend qu’il n’est pas son géniteur. Il perd son image de père.

Il avait quitté ses études à la mort de son père et reprend l’entreprise familiale. Il est entré dans l’âge adulte.

Il vend cette entreprise. Il perd son rôle d’homme actif.

Il quitte son pays, l’Islande. Perte des repères, pertes de la langue (il parle anglais avec ceux qui connaissent cette langue).

Il n’a plus que la vie à perdre…

On retrouve notre personnage dans un pays en ruine. Là, la narration change. On voit un pays en creux comme dans un bas relief sculpté.. C’est ce qui manque qu’on nous montre. La guerre n’est plus, mais elle a laissé un silence assourdissant. Il manque les hommes, les infrastructures, les musées, les archives, les maisons, les familles. On aura le sang et les larmes mais sans le reflet des pupilles et des mémoires.

Jonas ne se sent plus en droit de mourir, il ne lui reste qu’à se reconstruire au fur et à mesure que l’histoire prend un chemin inattendu.

Il y a le côté « surréaliste » de cet homme qui part en voyage, en vacances avec sa boîte à outils.

Audur Ava  Ólafsdóttir joue avec des dialogues de sourds :

« Qu’est que vous êtes venu faire dans ce pays » réponse : « je suis en vacances » ça tourne en boucle tant la réponse semble absurde qu’il ne soit pas là pour profiter de l’après-guerre. Un homme qui voyage avec sa perceuse électrique est suspect.

Et lui qui demande « où est l’entrée des thermes antiques de la ville » et la réponse est « on ne sait pas »

Il faudra que la confiance s’installe pour que les vraies réponses voient le jour.

Il en en bien d’autres situations étrangement comiques.

Le sujet pourrait être triste s’il n’y  avait pas l’ironie du sort et un certain humour.

Exemple d’ironie du sort. On l’agresse et il aura la vie sauve parce qu’il n’a pas peur de mourir. Lui qui voulait se suicider n’arrive même pas à se faire tuer ! (fait partie du processus de renaissance).

N’allez pas croire que le personnage soit naïf parce qu’il n’est pas doué avec la vie. Lorsqu’il s’agit de défendre un projet et des femmes il sait se montrer persuasif.

Il ne suffit pas de laisser son passé derrière soi pour refaire sa vie et être heureux, on ne repart jamais de zéro. C’est un roman sur la deuxième naissance.  Que va apporter cette renaissance ? Comment son  entourage va prendre les choses ?

Au niveau narratif il y a beaucoup d’ellipses. Il y est question de fragments dans le fond et la forme reprend cette idée. Les chapitres se suivent et son simplement séparés par des titres tirées de citations ou qui nous donnent une idée de ce qui va suivre. On a toute une thématique sur les lieux souterrains « cave et les cartons », sous-sols et les « mosaïques antiques », les meubles dans l’entrepôt couvert de poussière, les tapis qui cachent les carrelages et les peintures. Il faut révéler se qui se cache à l’intérieur. Il commence par se faire tatouer un nénuphar à la place du coeur.

Ce roman est dans l’idée d’aller vers l’autre et accepter de le comprendre… cela implique aussi que l’autre veuille vous accepter.

Ce feel good  nous montre qu’il n’y a pas d’âge pour trouver son vrai « moi ». C’est un roman de formation d’un homme adulte qui m’a beaucoup intéressé.

Article précédemment publié sur Canalblog

Rosa Candida

Audur Ava Ólafsdóttir

France Loisirs, 2010, 319 p.

LU DANS LE CADRE DU CLUB DE LECTURE D’AUF

LU DANS LE CADRE DU CHALLENGE NORDIQUE

LU DANS LE CADRE DU CHALLENGE 100 LIVRES

4 e de couv :

Le jeune Arnljótur va quitter la maison, son frère jumeau autiste, son vieux père octogénaire, et les paysages crépusculaires de laves couvertes de lichens. Sa mère a eu un accident de voiture. Mourante dans le tas de ferraille, elle a trouvé la force de téléphoner aux siens et de donner quelques tranquilles recommandations à son fils qui aura écouté sans s’en rendre compte les dernières paroles d’une mère adorée. Un lien les unissait : le jardin et la serre où elle cultivait une variété rare de Rosa candida à huit pétales. C’est là qu’Arnljótur aura aimé Anna, une amie d’un ami, un petit bout de nuit, et l’aura mise innocemment enceinte. En route pour une ancienne roseraie du continent, avec dans ses bagages deux ou trois boutures de Rosa candida, Arnljótur part sans le savoir à la rencontre d’Anna et de sa petite fille, là-bas, dans un autre éden, oublié du monde et gardé par un moine cinéphile.

Ma chronique :

Une jolie balade dans des lieux qui ne portent pas de nom. Pourquoi ? Parce qu’ils ne sont que des prétextes… on suppose que les champs de laves représentent l’Islande, mais c’est plus le changement de terreau qui compte… On va passer par exemple d’une cuisine de la mer, à la cuisine de la terre… Le changement d’environnement est propice a un changement de point de vue.

Le jeune héros (22 ans) n’a pas fini son travail de deuil (mais le termine t-on un jour ?) Il a été surtout été élevé par sa mère, à sa mort son père essais de prendre le relais, mais lui aussi est en deuil. Cette femme était le pilier de la maison jusqu’au dernier instant elle à pris en charge ses « hommes ».

Joseph le fils autiste, surtout élevé par le père, va trouver un autre système pour retrouver ses repères.

Le père essais de maintenir tout comme avant, en allant jusqu’à reproduire les recettes que sa femme notait dans son cahier. Une amie de la famille vient petit à petit le consoler.

Arnljótur, frère jumeau de Joseph, lui se retrouve père par hasard, sans vraiment prendre sa place. Ce personnage principal apparaît souvent avec le petit nom que lui donne son père Lobbi, comme un enfant.

Par moment Lobbi semble être un vieux garçon très attaché à sa maman, à d’autre un enfant. Il a un côté féminin très développé, d’ailleurs on le lui fait remarqué.

Le fort attachement à la mère est lié à la terre. Ils ont les roses comme passion commune. C’est d’ailleurs vers une roseraie mythique qu’il va se tourner pour essayer de trouver des réponses à ses questionnements existentiels.  Ce qu’on pourrait prendre pour une fuite est en fait une quête.

J’ai beaucoup aimé la partie « road movie » où le personnage principal va subir « des épreuves » comme dans un voyage initiatique.

Il va couper le cordon avec sa maison familiale, il va pour cela quitter son pays, perdre ses repères géographiques et linguistiques.

Les femmes vont l’aider. De l’hôtesse de l’air à sa fille en passant par sa voisine dans l’avion, les infirmières, l’aubergiste de la forêt, les étudiantes, la cuisinière du village, la vieille voisine et Anna.

La partie du voyage en forêt m’a fait penser au monde de l’enfance et tous les contes qui cristallisent nos angoisses : le petit poucet, Hansel et Gretel, les loups, les arbres qui prennent vie. Mais aussi la forêt peut représenter le monde féminin et ses mystères.

Il va se retrouver dans un monde « asexué », les moines vont lui permettre de se chercher, loin de la brutalité, des démonstrations de virilité et des rivalités sexuelles…

Finalement Anna va devoir prendre les devants, elle va jouer le rôle masculin et laisser le rôle « maternel ».

L’histoire ne dure que deux mois, Arnljótur n’aura le temps que d’accepter sa vraie nature.

C’est un roman qui aurait pu être un coup de cœur mais la partie dans la roseraie m’a laissait sur ma faim.

Un joli livre sur les questionnements intérieurs, tendre doux et sensible comme ses personnages.

Je le mets dans la catégorie livres « petits bonheurs ».

challe100

04/100

challenge_nordique

 5/5

Islande

article précédemment publié sur Canalblog

L’homme du lac

Arnaldur Indrason

Une enquête du commisaire Erlendur Sveinsson

Points, 2004, 406p. traduction 2008.

Prix du polar européen du Point 2008

4 ième de couv :

Il dormait au fond d’un lac depuis soixante ans. Il aura fallu un tremblement de terre pour que l’eau se retire et dévoile son squelette, lesté par un émetteur radio recouvert d’inscriptions en caractères cyrilliques à demi effacés. Qui est donc l’homme du lac ? L’enquête révélera au commissaire Erlendur le destin tragique d’étudiants islandais confrontés aux rouages implacables de la Stasi.

Mes impressions de lecture :

Merci Domy d’avoir insisté depuis des mois pour nous faire connaître cet auteur que tu apprécies énormément.

Ne connaissant pas la culture Islandaise j’ai appris des choses sur l’histoire et d’autres anecdotes sur ce pays. en autre il a fallu que je m’accroche pour les prénoms…

Le personnage hors norme du commissaire est exactement ce que j’apprécie dans les romans avec les personnages récurrents. ça spécificité à lui c’est une fixation sur les cas de disparition. les digressions sur l’aspect littéraire de ce sujet est intéressant. On imagine pas ce que les gens mono-maniaques peuvent découvrir. Vous imaginez une bibliothèque qu’avec des récits de disparition en Islande !

Sa vie personnelle est un peu « ratée » on ne peut réussir partout.

Je pense que je lirais d’autres romans dès que l’occasion s’en présentera afin de confirmer ou d’infirmer cette première sensation.

J’ai fait une bonne découverte…

Article précédemment publié sur Canalblog