Jean-Luc et Jean-Claude

Laurence Potte-Bonneville

Éditions Verdier, Août  2022, 160 p., 17 €

Rentrée Littéraire d’automne 2022

Dans ma médiathèque il y a… Cercle littéraire de janvier

Challenge d’hiver Vleel 2023 : Catégorie Tout Schuss

4e de couv :

Dans ce café d’un petit bourg où Jean-Luc et Jean-Claude ont la permission, tous les jeudis, de venir boire un verre (sans alcool), les choses prennent ce jeudi un tour inhabituel.
D’abord, il y a ce gars, ce jeune gars aux cheveux si blonds, qui émerveille les deux amis parce qu’il vient d’Abbeville. […]
Où vont-ils ? On ne sait pas très bien, au PMU peut-être. Et ce gars, que leur veut-il, à eux qui sont si vulnérables ?
Du souci, il en sera beaucoup question dans cette histoire dont une vieille dame et une phoque sont les témoins silencieux, et les collégiens d’une classe découverte des témoins beaucoup plus agités. Sur le parking d’Intermarché, ça ne se passe pas très bien. Faut-il partir encore plus loin, là où la virée pourrait devenir dangereuse ?

Cet ouvrage a reçu le prix Stanislas 2022 et le prix de la SGDL Révélation d’automne 2022 (dotation André-Dubreuil pour un premier roman).

Mes impressions de lecture :

C’est un livre qui m’a été conseillé par ma libraire, et généralement on a des goûts assez semblables alors je l’ai écoutée.

J’ai lu ce roman en une journée, c’est la consigne de la catégorie tout schuss. C’est tout naturellement qu’on ne pose pas ce livre avant la fin car on veut connaitre les tenants et les aboutissants.

C’est un roman avec des gens tous différents et chacun avec en tête des questionnements qui les font aller de l’avant.

Jean-Luc et Jean-Claude ce sont deux êtres qui se soutiennent l’un l’autre dans leurs difficultés psychologiques, leur léger décalage mental. De plus, Jean-Luc doit faire attention à l’addiction à l’alcool et Jean-Claude à son diabète. Ils prennent soin l’un de l’autre. Ils vivent dans une routine rassurante alors quand un grain de sable s’en mêle ça part en vrille.

Florent lui aussi a des soucis, d’argent et de cœur qui lui embrouillent un peu l’esprit, quand il croise la route du duo il ne va rien gérer. Il y a quelque chose de suicidaire dans son comportement.

La directrice, du Foyer pour personnes handicapées depuis quelques mois, se retrouve avec deux chambres vides on va la voir aussi se débattre avec sa conscience professionnelle.

On a une instit qui ne gère pas ses élèves et qui est complètement dépassée par les événements.

Il y a des gens biens intentionnés qui vont faire ce qu’ils peuvent… sans rien attendre en retour.

Cette histoire c’est un enchaînement d’événements qui fait penser aux dominos, l’un entrainant l’autre dans sa chute.

La tension dramatique est accentuée par la tempête de la veille et l’alerte orange qui est comme lei motiv. On sent le drame arriver, tout dans la narration nous y fait penser. La violence est en arrière plan, on sent que tout peut basculer… Je vous laisse le découvrir.

C’est un roman bref qui va à l’essentiel. Il a les bases pour un roman noir mais ce n’est pas ce que l’autre à choisi. Il a les ingrédients pour un feel-good et là non plus ce n’est pas la voie choisie par l’autrice. C’est un roman littéraire avec des ellipses qui laissent une place aux lecteurs.

« Jean-Luc et Jean-Claude » c’est une question de regard. Regard de la société sur les personnes en handicap mental, en personnes fragilisés par la vie, par la difficulté à communiquer ses sentiments.

La scène sur la plage est magnifique car on est dans l’affectif, l’empathie…

La fin est très belle.

Une très belle lecture.

L’anguille

Valentine Goby

Éditions Thierry Magnier, 2020, 144p. , 11,50 €

Dans ma médiathèque il y a…

4e de de couv. :

Camille est née sans bras. Avant son déménagement cela ne posait de problème à personne mais dans ce nouveau collège, le regard des autres ne la quitte plus. C’est vrai qu’elle impressionne
avec sa bouche et ses pieds d’une rare dextérité. Quand ils la voient nager comme un poisson, ses camarades n’en croient pas leurs yeux. Enfin, acceptée, l’enthousiasme de Camille l’anguille va gagner Halis, cet élève que l’on chahute à cause de son poids.

Mes impressions de lecture :

Quel plaisir de retrouver la délicatesse et la bienveillance de Valentine Goby. Dans chaque roman que je lis d’elle, que ce soit en adulte ou jeunesse, elle aborde des sujets forts qui font réagir le lecteur. Des sujets qui touchent au corps, à l’intégrité et à la fragilité. Mais corps et esprit se rejoignent lorsqu’il faut se protéger.

Ce qui m’a plu dans ce roman c’est qu’elle part d’un handicap physique vers le sujet de la situation de handicap. La souffrance dû au regard et au jugement de l’autre.

On découvre une adolescente comme les autres qui doit affronter un changement de vie et de collège. J’ai beaucoup aimé comment la romancière qui est la narratrice nous montre cette gamine avec des préoccupations qu’on peut comprendre. Puis petit à petit on va découvrir que son stress à une raison supplémentaire.

Nous allons surtout suivre deux personnages l’un avec « trop » et l’autre avec quelque chose en « moins ». Dans les deux cas le regard extérieur va influencer leur façon de réagir. Le regard pour certains s’arrête à la surface des choses. Elle va changer la focale.

Camille est lumineuse et elle va voir au-delà des apparences. Elle va aider par son comportement les autres collégiens à révéler ce qu’ils ont de beau en eux. Elle est dans une démarche positive et créatrice. L’émulation du groupe va leur permette de se surpasser.

La création est aussi au cœur de cette histoire, chacun est porteur d’une œuvre en devenir. L’adolescence peut être une période de construction et de mutation, mais pas toujours.

Ce roman permet de mettre en avant la beauté de la diversité et le potentiel de chacun, grâce à l’amitié, la bienveillance et le soutien. Tout n’est pas tout rose.

J’ai aimé la façon d’avancer étape après étape. Ils vont évoluer au fur et à mesure. Bien sûr tous ne sont pas dans cette dynamique.

C’était intéressant de voir les références du milieu sportif  de Camille.

Les personnages sont touchants. On les voit de la sphère familiale à la sphère sociale où le langage, la communication verbale et visuelle jouent un grand rôle.

Des personnages auxquels les adolescents peuvent s’identifier, des situations quotidiennes des collégiens avec leurs relations de groupe.

Je vous laisse découvrir cette histoire que vous soyez adolescent ou adulte vous y trouverez des questionnements. C’est un roman qui peut être le point de départ de discussion.

Tics olympiques

Roland Fuentès

Éditions Syros, Tempo Syros, 2009, 105 p., 6,95 €

Dans ma médiathèque il y a…

Chronique jeunesse du mercredi

tics olympiques

4e de couv. :

Un roman drôle et sportif de Roland Fuentès, à l’écriture extrêmement savoureuse.
« Au collège, on m’appelle “le sapin”. Ou “Noël”, même si mon véritable prénom c’est Julien. Ça vient de mes yeux, qui clignent en permanence. La plupart des gens ne me supportent pas deux minutes en face d’eux. Ils disent que je les rends nerveux. » Julien est bourré de tics. Le seul moment où il les oublie complètement, c’est lorsqu’il nage, au club Aubagne Natation, où s’est aussi beaucoup entraîné Alain Bernard, son idole. Alors, cet été, Julien a décidé de remédier à son problème. Il va tirer profit des épreuves de natation des JO de Pékin pour engager la plus dure des compétitions… celle qu’il va se livrer à lui-même, contre ces tics qui lui empoisonnent l’existence !

Ma chronique :

J’ai eu le plaisir de retrouver le côté passionné de sport  de l’auteur découvert avec « Vivant » et  pour tout ce qui concerne la natation que j’avais découvert dans « Tant que durent les rêves ». Il nous décrit à nouveau un jeune ados cabossé par la vie. Ici ce sont des tics qui lui pourrissent la vie. Mais loin de se poser en victime il va se surpasser. Il sait que la solution est en lui et il va tout mettre en œuvre pour y parvenir. Comme tout sportif il va commencer par des échauffements et des entrainements quotidiens. Avant se lancer dans la dernière ligne droite.

J’ai beaucoup aimé le rythme de l’histoire. On entre dans l’histoire et on n’a pas envie de s’arrêter avant de découvrir comment il va arriver à ses fins. Rien n’est facile c’est un combat permanent contre soi-même. On y voit les valeurs positives du sport. Volonté, endurance et ténacité.

Il y a des moments de forte intensité notamment lorsque Julien est face aux diffusions des compétions de natation aux jeux olympiques de Pékin. On s’y croirait à écouter les commentaires des journalistes sportifs.

On sent comme la famille et les amis sont importants. Avec ses équipiers c’est comme une seconde famille. Les relations sont différentes par rapport à celles d’autres collégiens. Roland Fuentès nous explique tout cela. On sent que c’est un milieu qu’il connait bien.

J’ai bien aimé le personnage de Louis, plus décomplexé, les relations entre les deux ados. Il y a comme un effet miroir entre les deux.

Tout ne va pas de soit, on va découvrir aussi des moments de doute, de rechute et de questionnements. Il faut que Julien se fixe un but.

Je vous laisse découvrir le cheminement de Julien.

Je viens de réaliser que dans « citadelle de glace » Roland Fuentès, nous parle aussi d’un ado avec des problèmes intérieurs à régler, et que c’est grâce à une passion qu’il va pouvoir se surpasser.

Cette histoire est arrivée au bon moment. Je n’arrivais pas à me concentrer sur mes lectures. De « voir » ce personnage faire tant d’efforts de concentration cela m’a motivé.

Une nouvelle fois j’ai adoré l’univers de Roland Fuentès… sans donner de leçon il montre aux « jeune » lecteurs qu’on n’a rien sans un effort et sans volonté.

NB ; je préfère cette couverture à celle de l’éditions plus récente : ici

Article précédemment publié sur Canalblog

Un funambule sur le sable

Gilles Marchand

Éditions Aux Forges de Vulcain, Août 2017,356 p., 19,50 €

Mes lectures Aux Forges de Vulcain

Rentrée littéraire 2017

4e de couv. :

Naître, grandir, aimer, enfanter : rencontrez Stradi, un jeune homme qui, malgré son handicap de naissance, mène sa vie avec un optimisme invincible. École, études, emploi, amours : Gilles Marchand nous propose un grand et beau roman d’éducation, un manifeste pour les pouvoirs de l’imagination et de la fantaisie. Le handicap de son héros ? Il est né avec un violon dans le crâne. Un vrai violon…

Mon Billet :

S’il y avait un seul livre de la rentrée littéraire 2017 que je voulais absolument lire, c’était celui-là. Pourquoi ? Parce que  c’est le second roman solo de  Gilles Marchand. Son précédent roman « Une bouche sans personne » est sorti l’année dernière et il m’avait touché dans la façon dont il avait abordé le problème de son héros.  Depuis quelques mois son éditeur joue avec nos nerfs… j’arrive après la bataille on dit déjà partout qu’il est excellent … alors je confirme et me voilà maintenant impatience de lire le prochain…

Lorsque j’ai commencé à lire les romans des Forges de Vulcain j’ai eu l’impression qu’ils avaient quelque chose en commun tout en étant différents. J’avais même trouvé des points communs que je cherchais ensuite dans les autres romans des Forges.

Voici les grandes lignes ou comment parler d’un livre sans spoiler :

Il y est question de relations familiales difficiles ou très complexes.

Il y est question d’enfances avec des problèmes

Puis vient l’adolescence et l’amitié. A la vie à la mort ! Période où tout est possible.

La solution est dans l’eau

Un petit grain de folie chez certains personnages

Un humour particulier

Une belle écriture avec ses codes particuliers, pas de pathos ni mièvrerie.

L’amour qui bouleverse tout.

Notion de temps et de progrès technologiques

L’idée de boucle. Le héros découvre qui il est et ce qu’il doit faire. La révélation.

Je vous vois sourire parce que vous allez trouver d’autres romans publiés hors les forges qui correspondent…  mais essayez de revoir les romans des Forges… faites le fameux pas en arrière très présent aux Forges avant d’aller vers le futur… Avez-vous vous aussi trouver des points communs ?

Les personnages de ce roman sont touchants. On est au plus près de ce qu’ils vivent.

Le handicap est présenté sous diverses formes et sans hiérarchisation.  Que ce soit un handicap visible ou invisible, qu’il soit physique ou psychique. Tous sont porteurs de souffrance. Il y a Stradi et Max, mais quand est-il du père de Stradi ? C’est un inadapté social qui a su faire son chemin, là on ne nous parle pas de handicap, et pourtant…

Le handicap Gilles Marchand nous en parlait aussi dans « la bouche sans personne », sur la nécessité de s’exprimer et de voir les belles choses de la vie.

Les personnages féminins sont forts. Que ce soit la mère de Stradi, Lélie ou la mère de Lélie, même la dame du premier… toutes sont des piliers qui les soutiennent les autres.

Gilles Marchand a une façon de raconter qui enlève aux sujets douloureux traités ce qui pourrait nous faire basculer dans le négatif, au contraire il y a une quête de bonheur même dans les petits détails. Prenons par exemple la souffrance mensuelle qu’on lui impose ainsi qu’à toute la famille, il y le petit cadeau (le bon point) que l’infirmière a besoin d’offrir.  L’histoire est très aboutie. On sait que le roman est fini au moment où notre héros est arrivé à la fin de son expérience. Il y a par moment des montées d’intensités très fortes  et la présence de l’océan renforce avec l’idée des vagues qui viennent se fracasser sur les rochers, et les rouleaux qui emportent sous l’eau.

La fin est sublime. Je ne dirais rien de plus !

La présence de la musique s’insère dans l’idée de temps et de tempo. On voit le temps passer au fur et à mesure que Max découvre les morceaux de musique. On voit aussi les rythmes changer.  Parfois lorsqu’il reste bloqué sur un morceau on a l’impression que le temps se fige pour lui. Cela fait aussi penser à l’adolescent qui ne veut pas grandir.

Ce que j’ai aimé c’est la pleine conscience de Stradi sur ce qu’il vit et sur la vie des autres.

Je remercie les Éditions des Forges de Vulcain pour leur confiance.

kokeshi coup de coeur
RL 2017
bouche sans personne

Article précédemment publié sur Canalblog