L’archiviste

Alexandra Koszelyk

Éditions Aux Forges de Vulcain, oct 2022, 268 p., 18 €

Mes lectures aux Forges de Vulcain

K est archiviste dans une ville détruite par la guerre, en Ukraine. Le jour, elle veille sur sa mère mourante. La nuit, elle veille sur des œuvres d’art. Lors de l’évacuation, elles ont été entassées dans la bibliothèque dont elle a la charge. Un soir, elle reçoit la visite d’un des envahisseurs, qui lui demande d’aider les vainqueurs à détruire ce qu’il reste de son pays : ses tableaux, ses poèmes et ses chansons. Il lui demande de falsifier les œuvres sur lesquelles elle doit veiller. En échange, sa famille aura la vie sauve. Commence alors un jeu de dupes entre le bourreau et sa victime, dont l’enjeu est l’espoir, espoir d’un peuple à survivre toujours, malgré la barbarie.

Mes impressions de lecture :

C’est le troisième roman d’Alexandra Koszelyk et un plaisir littéraire renouvelé. C’est romans bien que différents on la passion en commun. Passion pour un lieu et pour les êtres qui en émanent.

On découvre un personnage avec une érudition qui se mêle aux traditions populaires  et souvenirs  familiaux.  On va donc  passer de la sphère familiale à la sphère publique. De par son métier elle a engrangé un grand savoir. Mais on va se rendre compte qu’avant cela elle a engrangé une savoir populaire et plus traditionnel transmis entre autre par la mère et le père. L’histoire se déroule en Ukraine mais on peu transposer à notre propre culture et notre propre vécu.

J’ai ressenti une forte présence des sens. Les sens qui  jouent un rôle dans l’acte de création mais aussi de réminiscences.

Le personnage principal qui est présente sous la lettre K (pas anodin du tout comme choix). Elle va évoquer des souvenirs d’enfances et convoquer des fantômes du passé, une nouvelle fois on est entre la sphère de l’intime et la sphère de l’universel.

J’ai beaucoup aimé l’aspect onirique, le lien entre le visible et l’invisible, conscient et inconscient. Alexandra Koszelyk joue aussi avec le réel magique qui crée des liens des âmes du passé. C’était très beau ce qui ressortait de chaque « rêverie », et comment elle a relié l’universel à l’histoire familiale.

C’est un roman qui donne envie de se replonger entre autre dans l‘œuvre de Gogol par exemple. Il y a aussi un chapitre qui m’a fait à son premier roman « À crier sur les ruines » que je vous conseille fortement.

La thématique de la forêt et du monde souterrain sont des thématiques liées à la terre, à la profondeur et aux racines, ce qui illustre parfaitement ce qui se passe dans ce roman. Cela vient aussi faire écho aux mouvements qui animent le personnage de K.

Il y a un côté Kafkaïen dans se que subit notre héroïne. On l’oblige à faire quelque chose d’absurde au nom de la propagande d’État.  Ce qui va la rendre rebelle par réaction. Grâce ou à cause de ce qui lui est demandé on va découvrir certains éléments fondateurs de la culture.

On a aussi la thématique du deuil, elle ne nous parle pas que de la perte de personne chères mais aussi pertes du monde connu, de l’innocence.

J’ai été très touchée par cette histoire non seulement parce que cela touche à la situation actuelle de l’Ukraine, mais surtout parce que cela entre en écho avec mon histoire et celle de beaucoup de gens qui sont très attachés à leur racines. On est entre pays peuplé par les souvenirs et réalité. Je vous laisse lire entre les lignes ce que l’autrice partage.

Je vous invite à découvrir ce roman où la poésie  des lieux, des mots et idées nous transportent dans l’univers littéraire d’Alexandra Koszelyk avec une forte présence de l’art.

Je remercie les Éditions Aux Forges de Vulcain de leur confiance.

La dixième muse

Alexandra Koszelyk

Aux Forges de Vulcain, 15 janv. 2021, 280 p., 20 €

Mes Lectures Aux Forges de Vulcain

Anecdotes de lectrice :

Au mois de mars-avril pendant le premier confinement David Meulemans, l’éditeur des Forges de Vulcain avait proposé des conversations téléphoniques avec ses auteurs et collaborateurs. J’avais apprécié la conversation qu’il avait eue avec cette autrice qui nous avait partagé ses lectures. J’avais découvert que nous avions des goûts communs en ce qui concerne la littérature.

Pour le moment pas de rencontre avec les auteurs mais dimanche 17 janvier une rencontre aura lieu sur  zoom organisée par Serial Lecteur Nyctalope.

Ce roman a réveillé des souvenirs d’une autre rencontre celle de Geneviève Dormann qui été venue à Perpignan nous présenter son roman « la gourmandise de Guillaume Apollinaire » à sa sortie en 1994. J’ai ressorti le livre…

Mes impressions de lecture : Coup de Cœur

Il y a un an, je découvrais le premier roman d’Alexandra Koszelyk « A crier dans les ruines ». Ce fut un coup de cœur, allais-je en avoir un pour le deuxième roman ? Oui car j’ai à nouveau été emportée par l’histoire et l’écriture d’Alexandra Koszelyk et son érudition.

J’ai beaucoup aimé le fils rouge de « l’arbre » dont la fibre et la sève vont tisser des liens entre le tendre Florent et le grand Apollinaire, entre le présent et le passé.

Alexandra Koszelyk joue avec ce pauvre Florent, elle va lui ouvrir les portes d’un monde très éloigné de ce qu’il connait. Il nous apparait presque comme un être effacé, transparent et elle va lui donner la chance de vivre quelque chose d’unique et ainsi de donner un autre sens à sa vie. Cette petite touche de fantastique n’est pas sans rappeler Kafka. L’univers de Guillaume Apollinaire va dévorer celui de Florent qui arrive à douter de sa santé mentale.

On a l’impression que ces deux êtres n’ont rien de commun et petit à petit on se rend compte que si. Par exemple ce syndrome de l’abandon et le rapport aux femmes.

Le roman est composé de chapitres qui nous font vivre au présent avec Florent qui perd pied petit à petit. Le monde onirique vient créer des passerelles avec se que Florent va découvrir. D’autres chapitres donnent la parole aux muses, à l’entourage de Guillaume et au poète. Des lettres, des poèmes, des extraits de journal intime… Ce qui dessine pas à pas une sorte de biographie romancée d’Apollinaire.

On va revivre les 39 ans de Guillaume Apollinaire et sa soif de vie. A croire qu’il savait qu’il allait mourir jeune et qu’il lui fallait profiter de chaque plaisir que la vie lui offrait.

Ces muses ont chacune joué un rôle différent et ont contribué à  créer des poèmes marquants. J’ai aimé comment Alexandra Koszelyk a su associer un poème à chaque moment clé qu’elle nous a raconté.

Elle utilise les rêves pour que Florent entre en communication avec ce passé, mais aussi les « signes magiques  de la vie» qui vont créer des connexions. Ces synchronicités sont crées par exemple par une image, un nom de rue, un livre, un tableau, une photo, un parfum, une lumière…

Au fur et à mesure que Florent découvre des aspects de la vie d’Apollinaire il crée un déséquilibre dans sa vie cependant il n’y a pas que ces côtés négatifs à cela. Je vous laisse découvre ses changements, ses transformations… Après quels fantômes courent-ils tous ?

Alexandra Koszelyk a su créer une atmosphère très particulière où le réel magique, le pas de côté dans l’imaginaire réveille des images fantômes. Un mélange d’amour et de manque. Il y a beaucoup d’amour dans ce roman tout en parlant l’absence de l’être aimé.

J’ai pris grand plaisir à l’évocation de la période de la Belle Époque qui va se terminer avec la première guerre mondiale qui coïncide avec la mort de Guillaume Apollinaire. On voit comment la société était entrain de changer. J’ai souris au clin d’œil à la tapisserie signée William Morris dont l’œuvre est publiée Aux Forges de Vulcain.

Ce roman m’a donné envie de me replonger dans la poésie de Guillaume Apollinaire, j’avais « alcools » sous la main.

Je vous laisse découvrir les autres facettes de ce roman et toutes les figures majoritairement féminines.

Je vous laisse découvrir ce magnifique roman et la belle plume d’Alexandra Koszelyk.

Je remercie les Éditions Aux Forges de Vulcain de leur confiance.

vulcain
kokeshi coup de coeur

À crier dans les ruines

Alexandra Koszelyk

Éditions Aux Forges de Vulcain, sept 2019, 251 p., 19 €

 Lu aussi dans le cadre du challenge « IlEstBienCeLivre »
janvier lire un livre acquis en 2019
Challenge rentrée littéraire 2019

crier

Lena et Ivan sont deux adolescents qui s’aiment. Ils vivent dans un pays merveilleux, entre une modernité triomphante et une nature bienveillante. C’est alors qu’un incendie, dans l’usine de leur ville, bouleverse leurs vies. Car l’usine en question, c’est la centrale de Tchernobyl. Et nous sommes en 1986. Les deux amoureux sont séparés. Lena part avec sa famille en France, convaincue qu’Ivan est mort. Ivan, de son côté, ne peut s’éloigner de la zone, de sa terre qui, même sacrifiée, reste le pays de ses ancêtres. Il attend le retour de sa bien-aimée. Lena, quant à elle, grandit dans un pays qui n’est pas le sien. Elle s’efforce d’oublier. Mais, un jour, tout ce qui est enfoui remonte, revient, et elle part retrouver le pays qu’elle a quitté vingt ans plus tôt.

Anecdotes de lectrice :

Ce roman a toute une histoire personnelle donc un petit supplément, je n’ai pas coché une case et il est arrivé… non ! Si vous me suivez sur les réseaux vous l’avez déjà lue, mais je vais le raconter ici pour garder une petite trace écrite.
L’éditeur a la gentillesse de m’envoyer parfois des services presse mais pour celui-ci ça ne s’est pas fait. Alors je décide de l’acheter. Je vois alors que l’autrice allait présenter et dédicacer son livre dans la ville où vit ma fille… j’ai tellement insisté qu’elle est allé me le chercher malgré la fièvre ! Était-ce un signe ? Un lien entre l’histoire et ma propre vie ?
Juste avant de lire ce livre j’ai lu un roman jeunesse « Dix minutes en mode panique » de Jean-Christophe Tixier. A première vue rien ne les reliaient et pourtant il y est question de coquelicots et d’un garçon préférant la vie dans la forêt et la nature (que l’homme détruit) qui va se retrouver séparé de sa bien aimée (moins longtemps), et les héros ont 14 ans et là aussi l’adolescent frôle la mort…
Une dernière petite anecdote… je lisais cette histoire et à un moment donné notre héroïne se retrouve en Roumanie dans les Carpates et j’ai souris car au moment où paraissait ce roman un autre roman de la même maison d’éditions sortait et il y a une partie de l’histoire dans les Carpates !!! Question est-ce que l’éditeur impose des « contraintes littéraires » à ces auteurs ?  Je me suis demandé s’il n’y avait pas d’autres subtilités du même genre que je n’aurais pas repéré puisque je ne lis pas tous les romans parus…

Ma chronique :

Une histoire d’Amour publiée chez Aux Forges de Vulcain ne signifie pas une romance loin de là. Après lecture je vous le confirme. Là on est dans l’Amour Unique, sublime, absolu, inconditionnel d’autant qu’il y a en lui l’exaltation et les illusions de l’adolescence, à la vie à la mort.
On va donc avoir toutes les thématiques universelles de l’adolescence mais bousculées par les événements du 26 avril 1986.
On retrouve toute l’innocence de l’enfance. C’est deux êtres que tout devait séparer vont vivre de manière fusionnelle. A l’âge des premiers émois amoureux ils vont être projetés hors de leur Eden sans avoir coqué la pomme. Deux cœurs purs emportés par l’histoire.
On va découvrir les déchirante séparations et comment ils vont devoir survivre chacun de leur côté. On va avoir toute la thématique des barrières, barrière culturelle, barrière de la langue, barrière es-ouest etc..
En parallèle on a l’Ukraine  déjà éprouvée par l’histoire qui va subir ce drame qui va la faire sortir de son innocence, ignorance, du déni et de l’incompréhension.
Je me suis remémoré cette époque là, j’avais à peine plus que nos héros, j’habitais près d’une centrale et on n’était pas plus informés qu’eux ? Le sommes nous plus aujourd’hui ? Qu’avons nous appris de cette catastrophe ? Les infos, les réseaux sociaux, internet sont des sources plus fiables ?
Ce roman retrace aussi les bouleversements politiques et socio-économiques qui ont suivi. La chute du mur de Berlin, la Pérestroïka etc.
Mais ceci n’est qu’une infime partie du roman. Il développe aussi d’autres sujets comme la culture, la langue, l’Histoire et ses éternels recommencements. Histoire avec un H majuscules et l’histoire familiale avec ces conséquences.
L’exil, un autre traumatisme. On va découvrir comment chaque membre de cette famille va survivre, s’adapter ou pas. Trois générations sous un même toit, trois visions de la vie et de l’histoire. Les non-dits, ces traumatismes refoulés. Qui dit exil, dit départ, déracinement, changement de langue, modification de l’identité, et de manière induite il a ceux qui sont restés. Thèmes de l’abandon, de la trahison, du sacrifice…
Ce que j’ai aussi beaucoup aimé ce sont toutes les références littéraires qui vont servir de substrat. La place des  « passeurs de mots » de contes et légende, on a tous besoin d’une Mme Petitpas.  Complété par la place de l’écrit et de l’oral, les chants et des lettres vont compléter les parts manquantes. Sa rencontre avec une autre âme sœur féminine qui va lui faire découvrir un autre aspect des racines familiale.
De la forêt à la mer, de la terre à l’eau en passant par le feu nucléaire on y retrouve ce qui fait l’âme slave, cette nostalgie, ce côté tragique, ce vague à l’âme entre rire et larmes. Il y  a beaucoup de souffrance et de violence et pourtant c’est l’espoir qu’on ressent, on se raccroche à chaque signe.
Ce roman est un coup de cœur par qu’il est bien écrit, riche et intense, il y a un crescendo dans ce qu’on ressent. Alexandra Koszelyk a su donner un côté universel en intégrant la littérature, les mythes et légendes. Léna aura eu besoin d’un voyage intérieur et une reconstruction de son histoire pour retrouver son Ithaque, mais son « Pénélope » aura-t-il eu la force de l’attendre alors qu’il vit abandonné dans les décombres et les tombes ?

Il y a beaucoup de sujets qui entre en résonance avec ma vie.

L’autre jour je parlais d’un autre roman et je disais qu’il traité de la thématique de  la famille. Pour moi c’est un sujet qui m’accompagne depuis toujours alors c’était une évidence je n’ai pas développé. La personne en face qui ne me connais pas depuis longtemps m’a demandé de développer. Et je lui répondu « la famille est une micro société, on est sensé être protégé et en fait on retrouve dans ce microcosme toutes les grandes sentiments, c’est reflet de l’extérieur, le mensonge, la trahison, la violence pas toujours la sécurité attendue ainsi que l’amour. » Eh bien cela se confirme dans cette histoire.
Si vous croyez que je vous ai dévoilé ce roman vous vous trompez car ce n’est pas forcément ce qui aura retenu votre attention. Certains seront pris par la force d’évocation, le phrasé, les mots,  d’autres cette quête de soi et de l’autre, d’autres c’est l’aspect politique et historiques… allez savoir ce qui vous plaira dans cette intrigue !
Je ne vous ai pas parlé des personnages aux fortes personnalités et à leur intériorité puissante… ni des lieux traversés…
Je comprends pourquoi ce roman est encensé par les libraires et les lecteurs…

Allez-y les yeux ouverts !

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